Bac Philo 2024 : sujets corrigés de l'épreuve 🎓

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Voici des propositions de corrigés pour les différents sujets à traiter.

Sujet 1 : La science peut-elle satisfaire notre besoin de vérité ?

Analyse du sujet : Le sujet portait sur la science, mais il était nécessaire d’analyser précisément les termes du sujet. La formulation en « peut-elle » indiquait à la fois une réflexion sur la possibilité (est-il possible ?) et sur la légitimité (est-il permis?). La notion de « besoin de vérité » évoque une tendance nécessaire et irrépressible, qui pourrait être satisfaite par la possession ou l’obtention de la vérité. 

Proposition d’introduction : La science semble, à première vue, née de notre besoin de vérité : elle répond aux questions que nous nous posons sur l’essence de la nature (sciences physiques et biologiques) et sur l’essence de l’homme (sciences humaines). Elle produit donc un discours cohérent et rationnel qui nous permet de formuler des théories et des lois qui décrivent de manière adéquate le fonctionnement de son objet : en ce sens, elle vise une vérité comme adéquation du discours et de l’esprit à la réalité. Cependant, si cette ambition paraît constituer l’idéal de la science, la science effective peut parfois nous décevoir : il arrive que des théories rivales et incompatibles soient également utilisées (comme les théories corpusculaires et ondulatoires de la lumière) et que certaines thèses restent au niveau d’hypothèses, donc de propositions probables et non absolument certaines. Ces limites de la science effective peuvent être redoublées par une interrogation plus fondamentale. Le besoin de vérité porte en lui l’exigence d’une satisfaction complète et absolue : nous ne sommes satisfaits que lorsque nous possédons la vérité pleine et entière, que nous sommes comme en contact avec ce dont nous avons besoin. Or, la science est un ensemble de discours construits et élaborés qui fournissent des descriptions qui permettent de prévoir et d’expliquer certains phénomènes, mais on peut se demander si elle est capable de nous dévoiler l’essence même des choses.

D’un côté, la science semble être née du besoin de vérité et travailler, par ses progrès scientifiques, à le satisfaire. Mais le besoin de vérité semble porter en lui une exigence de possession absolue, et non relative, de la vérité, d’un contact avec l’essence des choses, ce que la science paraît ne pas pouvoir offrir. La science serait-elle condamnée à entretenir un besoin de vérité, qui est sa raison d’être subjective, sans pouvoir satisfaire absolument ce besoin ?

Conseils : un tel sujet demande de pouvoir développer deux ou trois exemples scientifiques, précis et détaillés.

I- La science est née du besoin de vérité, qui en soutient l’exercice subjectif

  1. La science semble avoir pour vocation de découvrir un certain nombre de vérités, de propositions qui décrivent adéquatement le réel.
  2. C’est même la recherche de ces vérités qui paraît être le motif subjectif des agents qui se livrent à la recherche scientifique. On peut insister ici sur le motif de la curiosité, qui nourrit le travail scientifique.
  3. Le caractère irrépressible du besoin de vérité (on ne peut pas résister à un besoin, qui s’impose à nous) paraît même être l’une des origines du progrès continu de la science. Puisqu’il ne suffit pas de posséder une certitude partielle sur la réalité pour combler le besoin de vérité, la science tente de donner une explication cohérente et systématique du réel.

Auteurs possibles : Platon, Aristote, Augustin, Bachelard…

II- Cependant, le besoin d’une vérité absolue, universelle et définitive ne semble pas comblé par l’exercice de la science, en tant qu’ensemble de lois et de théories historiquement déterminées

  1. La science ne décrit pas adéquatement le réel, mais procède par rectification continue de théories et de lois : en ce sens, les vérités scientifiques sont rarement définitives, mais souvent provisoires. Elles peuvent toujours être rectifiées et retravaillées.
  2. Le besoin d’une vérité absolue semble donc à la fois être le motif recherché par les agents scientifiques et ce qui leur échappe nécessairement, du fait du caractère historique et progressif de la science.
  3. Il existe donc des limites internes à la possibilité pour la science de satisfaire absolument notre besoin de vérité. 

Auteurs possibles : Gaston Bachelard, Thomas Kuhn, Denis Diderot (Pensées sur l’interprétation de la nature).

III- Les limites externes de la science : la science n’est pas en mesure, ni peut être légitime, dans sa prétention à vouloir satisfaire nos besoins de tous types de vérité

  1. Le besoin de vérité ne demande pas qu’une description utile du réel, qui permette de le prévoir et de le décrire : il porte en lui une exigence de contact immédiat avec le réel.
  2. Mais ce contact semble impossible à travers la science qui repose sur une série de médiations complexes (théories, concepts, modèles).
  3. Enfin, il est possible que certains types de vérité (d’ordres moral, métaphysique) ne soient pas accessibles à la science, mais relèvent d’une approche différente du réel (poétique, artistique, expérience morale ou quotidienne). Il importe de distinguer le besoin d’une vérité objective, qui s’adresse à notre entendement, et d’une vérité qui concerne notre rapport concret et pratique au monde.

Auteurs possibles : Pascal, Kant, Nietzsche, Bergson, Husserl, Merleau-Ponty.

Conclusion : le sujet demandait à la fois de mettre en question la prétention de la science à satisfaire notre besoin de la vérité qu’elle promet (une description objective et médiate du monde) et de la vérité, au sens absolu et général du terme.

Sujet 2 : L’État nous doit-il quelque chose ?

Analyse du sujet : La formulation « doit-il » implique ici non pas un impératif, mais une notion de dette : l’État serait en dette envers nous, car nous lui avons donné quelque chose. Le « nous » paraît renvoyer aux sujets de l’État, au peuple qui le constitue. Enfin, on pourrait essayer de déterminer la notion vague de « quelque chose » : l’État nous doit-il sa force, la liberté, la sécurité, etc. ? 

Proposition d’introduction : L’État désigne les différentes institutions qui assurent légalement l’administration d’une population et d’un territoire. La question centrale est celle de la légitimité de son pouvoir : puisque l’État tire sa force et sa puissance de ceux sur qui il s’exerce (le peuple), ne leur doit-il pas sa propre légitimité ? En ce sens, l’État serait redevable au peuple qu’il administre. Celui-ci acceptant de se soumettre aux lois de l’État, ce dernier devrait leur conférer la sécurité et la prospérité qu’ils demandent. En même temps, cette exigence paraît difficilement pouvoir s’appliquer de manière indéterminée et à chacun de nous. Puisque l’État a pour rôle de garantir une forme d’égalité juridique et de paix sociale, il ne peut être débiteur de chaque individu de manière isolée, et il importe de s’interroger sur la nature de ce que devrait l’État au peuple et aux individus. Que doit donc l’État aux citoyens qui le constituent ?

Conseils : il pouvait être utile de connaître les théories classiques du contrat politique (Hobbes, Rousseau).

I- L’État ne paraît pas pouvoir satisfaire toutes les demandes individuelles qu’on lui soumet

  1. L’État a pour vocation de pacifier les relations entre les citoyens : il doit donc avoir pour objet un bien commun.
  2. S’il doit la sécurité à chacun de nous, il ne paraît pas pouvoir subordonner tous les désirs individuels au bien-être de la communauté.
  3. Il existe donc nécessairement une limite à ce que l’État nous doit, dans la mesure où l’État ne lie pas tant chaque individu aux institutions, que le peuple aux institutions elles-mêmes.

II- Mais l’État est redevable, à la fois de son existence et de sa légitimité, des citoyens qui le constituent : il leur doit donc un certain nombre de choses.

  1. L’État peut être conçu comme le fruit d’un contrat passé entre chaque individu et le souverain, chaque individu se désistant de sa liberté.
  2. L’État paraît donc redevable de quelque chose à chaque individu : au moins de leur sécurité.
  3. La question est toutefois de savoir l’étendue de cette dette : n’inclut-elle que la sécurité physique ? Ne doit-elle pas garantir un certain nombre de libertés individuelles et d’exigences sociales ? On pouvait ici notamment poser la question des impôts : ils constituent une aide des citoyens à l’État, qui paraît exiger un retour.

Auteurs possibles : Hobbes, Rousseau, Kant.

III- La question d’une dette de l’État envers les citoyens pose le problème des modalités du contrôle du remboursement de cette dette. Comment s’assurer que l’État restitue aux citoyens ce qu’il leur doit ?

  1. La nécessité d’une extériorité à l’État, comme un système juridique qui garantit le rapport réciproque de l’État et des individus.
  2. La nécessité d’une extériorité à l’État qui limite son pouvoir et travaille à définir ce qu'il doit à la communauté (comme par exemple la société civile).
  3. En ce sens, le contenu même de ce que doit l’État aux individus et à la communauté peut-être, sur la base d’un système juridique fixe, redéfini de manière cyclique, notamment à travers le suffrage universel.

Auteurs possibles : Montesquieu, Tocqueville, etc…

Conclusion : il importait d’interroger à la fois le contenu de ce qui est dû à l’État, les raisons de cette dette (le fait que l’État tire sa légitimité du « nous » qu’il administre), mais aussi les modalités pratiques et juridiques du contrôle du remboursement de cette dette.

Sujet 3 : Texte de Simone Weil

Le texte de Simone Weil décrit un processus d’objectivation des ouvriers, qui s’assimilent progressivement au système qu’ils font fonctionner. La particularité de ce texte est de fonder cette objectivation progressive sur une analyse psychologique : c’est parce que nous devons trouver des mobiles pour une action, que nous choisissons des mobiles qui nous permettent de continuer à travailler, même lorsque le sens du travail est inexistant. Ces mobiles ont, par leur pauvreté, une fonction obsessionnelle et ils tendent à rétrécir le domaine de la pensée. Comment la structure psychique de l’ouvrier au travail peut-il le conduire à abandonner toute pensée libre ?

I- Une analyse psychologique : les mobiles du travailleur à la chaîne

  1. Une thèse générale : toute action exige un mobile, c’est-à-dire une raison pour laquelle on la fait (conseil : il faut définir immédiatement les concepts centraux pour les utiliser). Ce mobile donne non seulement un sens à l’action, mais une « énergie », c’est-à-dire la force subjective qui nous permet de la réaliser.
  2. Dans l’usine, les mobiles ne sont pas extérieurs : ils sont internes, car le monde moderne se distingue de l’esclavage. Il n’y a pas de « fouets », etc…, c’est-à-dire de contraintes externes, mais les contraintes sont à forger par le sujet, devant la difficulté de la tâche.
  3. Ces mobiles sont alors purement négatifs, et dictés par des affects négatifs : crainte, désir d’argent (donc peur d’en manquer), etc… On pouvait noter l’analyse axiologique de S. Weil qui interroge non seulement le contenu de nos mobiles, mais leur qualité.

II- Le renversement : du mobile à l’absence de pensée

  1. L’analyse psychologique se poursuite à travers le concept d’obsession, c’est-à-dire d’attention prolongée et exclusive sur un seul objet, qui empêche la considération d’autres objets ainsi que la dynamique de la pensée. 
  2. Cette obsession est la condition même de l’efficacité de ces mobiles, devant la difficulté du travail.
  3. La conséquence en est une « rétractation » de la pensée : rétrécissement en termes d’objet, mais aussi de temps. La pensée n’imagine plus le futur, ne se souvient pas du passé ; elle est rivée à l’instant (un « point du temps »), le présent du travail. On pouvait analyser le terme de conscience (qui implique réflexivité, temporalisation et distanciation) et sa mise à distance dans l’activité du travail.

III- La description de la servitude psychologique

  1. Il faut commenter l’analogie avec la pesanteur : l’idée est qu’en absence de contraintes extérieures, les contraintes sont le produit d’une servitude volontaire dont l’origine est intérieure, c’est-à-dire psychique. Ces contraintes internes ont la même force (voire davantage) qu’une contrainte physique.
  2. Elle a pour conséquence une isolation du travailleur, qui n’a plus de pensée relationnelle, capable de le mettre en présence d’autrui ; celui-ci, déjà dépossédé de sa liberté et réflexivité cognitive, devient même le reflet du système. On peut donc dire que la structure globale a été intériorisée par chacun et est désormais reflétée, exprimée dans les gestes de chacun.
  3. Enfin, il fallait mettre en avant la dimension temporelle de la description de Simone Weil : la fin du texte insiste sur le fait que le temps ne passe pas, car il n’est pas rempli de l’activité de la pensée, qui se projette vers le passé et le futur, mais uniquement rivé à l’instant d’un système, qui leur est extérieur. Le paradoxe est donc que le travailleur s’ennuie alors qu’il ne cesse de travailler : car l’ennui ne paraît pas impliquer, pour S. Weil, simplement l’activité extérieure, mais la diminution de l’activité de la conscience.

Conseils : On pouvait mettre en relation ce texte avec les textes connus de Marx sur l’aliénation au travail.

Conclusion : S. Weil nous présente ici une description d’une grande finesse psychologiquement. La situation objective de travail produit un rétrécissement de la pensée, à travers deux phénomènes psychologiques communs : la nécessité de trouver un mobile à son action et la transformation de ce mobile en obsession. 

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