Le XXe siècle, à côté de l’autobiographie traditionnelle, s’ouvre, par le contact avec la littérature, à de nouveaux horizons. L’heure est, pour certains écrivains, à la remise en cause des canons autobiographiques, fondés sur l’effort de cohérence et l’apparente authenticité des grands modèles (saint Augustin, Rousseau). Ces grands modèles auraient pour effet d’uniformiser le récit de l’existence des auteurs, tant narratologiquement, qu’énonciativement, que topiquement (mêmes scènes attendues : enfance, école, mariage...).

C’est dans ce contexte que s’élabore l’autofiction, genre de l’écriture de soi, problématique par ses frontières et ses porosités. Ce néologisme est créé en 1977 par le critique et écrivain Serge Doubrovsky (1928- 2017) pour désigner génériquement son roman Fils : le personnage principal porte le nom de Serge Doubrovsky, mais le genre textuel est le roman, non l’autobiographie. Doubrovsky décèle chez l’écrivaine Colette la genèse de l’autofiction dans La Naissance du jour (1928), récit dans lequel elle mêle personnages réels et fictifs. Mais il faudrait revenir bien avant avec La Recherche du temps perdu (1913-1927) de Marcel Proust (1871-1922). Ce genre, au fondement biographique, qui réinvente la vie de l’auteur (changement de nom des personnages, de lieu, de l’auteur) est en vogue au XXe siècle, mais existe génériquement avant cet acte de baptême.

L’écrivaine et critique Marie Darrieussecq (1969-) le définit comme un « récit à la première personne se donnant pour fictif (souvent on trouvera la mention roman sur la couverture) mais où l’auteur apparaît homodiégétiquement sous son nom propre, et où la vraisemblance est un enjeu maintenu par de multiples "effets de vie" » (Darrieussecq, 1996 : 369-370).