Francis Ponge (1899-1988)

La carrière littéraire de Francis Ponge est ponctuée de rencontres fondatrices. La première d’entre elles survient alors que l’artiste est encore adolescent et élève dans un lycée de Caen qu’il a rejoint en raison de la nomination de son père en Normandie. Il y découvre l’œuvre du poète classique Malherbe pour lequel il gardera tout au long de sa vie une admiration sans bornes.

En publiant ses premiers textes à partir des années 1920 et en rencontrant parallèlement Jean Paulhan, alors secrétaire de la célèbre NRF, l’auteur de La Rage de l’expression voit en ce compagnon d’écriture, un ami, mais également un lecteur soucieux de dispenser ses conseils avisés.

Quelques années plus tard, il fait la brève connaissance de Breton dont il ne partage pas forcément toutes les opinions, puis celles de Camus et Sartre qui, dès la parution en 1942 du Parti pris des choses, ne tariront pas d’éloges, notamment avec la rédaction de L’Homme et les choses par ce dernier en 1947.

Soulignons également sa fréquentation des peintres Picasso et Braque qui lui inspireront l’idée d’atelier pour représenter son travail sur la matière poétique et la solide amitié qui, à partir des années 1960, le lie au jeune écrivain Philippe Sollers, décédé en mai 2023, et dont il rédigera en 1970 ses Entretiens.

Les premiers écrits de Ponge naissent d’une double expérience douloureuse. D’abord, son père disparaît en 1923, mort qui pousse l’écrivain à se réfugier dans l’observation et dans l’expression des choses afin de ne pas céder au désespoir. Ensuite, parce que cette disparition impose au jeune homme — il a alors vingt-quatre ans — de subvenir aux besoins de sa famille qui le rejoint à Paris, l’obligeant à occuper un emploi aux Messageries Hachette et ne lui laissant que peu de temps pour assouvir son irrépressible désir de s’exprimer.

Cependant, malgré les vicissitudes du quotidien, sont d’abord publiés en 1926, les Douze petits écrits, qui préfigurent son œuvre majeure, Le Parti pris des choses, recueil dans lequel chacun des textes, souvent brefs, explore un objet ou une chose du quotidien à l’aide d’une prose poétique destinée à révéler la beauté et la complexité des éléments les plus banals comme « Le cageot », « La Bougie » ou « La Cigarette ».

Avec Proêmes, publié en 1948, mot-valise inventé par l’auteur associant « prose » et « poème », Ponge poursuit son exploration du monde naturel et donne voix aux objets du quotidien. Utilisant le plus souvent des images inattendues et des métaphores originales, ces courts poèmes abordent des thèmes variés et révèlent, comme dans La Rage de l’expression, une véritable fascination pour la nature et pour les mots, l’ensemble témoignant d’une sensibilité poétique profonde et d’une vision originale du monde.