Notre rapport à notre corps est trompeur. Car sa compréhension n'est pas réflexive : ce que je saisis n'est qu'un jeu diffus de sensations et d'impressions fugaces. Comment pourrais-je être certain de la constance de l'existence de « mon corps », alors que les sensations qu'il me procure sont inconstantes ? Qu'est-ce qui peut prouver que je ne suis pas dans une matrice, au sens du film des frères Wachowski (Matrix), ou que mon cerveau ne baigne pas dans une cuve, connecté à un ordinateur qui le stimule au moyen d'impulsions électriques reproduisant les perceptions visuelles, auditives, tactiles, y compris les perceptions d'un corps qui serait le mien... sous forme de code informatique ? Ainsi, nos intuitions sont impuissantes à justifier, en matière physiologique, la distinction entre artifice et nature.
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Éloge de la médecine
L'existence de mon corps semble intuitive, mais les données sensorielles et perceptives sont parfois trompeuses. Nous pouvons soupçonner que la façon dont nous comprenons notre corps n'est pas si naturelle – au sens de spontanée. En ce sens, mon esprit est moins opaque que mon corps : l'esprit est réflexif, c'est-à-dire conscient de lui, alors que le corps ne se comprend lui-même que grâce à des artifices techniques qui sont la médecine. Seuls les artifices techniques permettent d'éclairer mon corps : sans artifice, sa nature resterait un mystère à nos yeux. Un éloge de la médecine est donc légitime : non seulement parce qu'elle contribue à nous guérir de nos maux, mais parce qu'elle est une entreprise théorique de compréhension du corps, ce support si naturel, mais si mystérieux de l'identité personnelle.