La solidarité, en tant que principe d’entraide et de responsabilité collective, est présente depuis les premières formes d’organisation sociale humaine. Elle a évolué avec le temps, prenant des formes différentes selon les contextes culturels, sociaux et économiques. Ce cours retrace l’évolution de la solidarité, de ses premières manifestations dans les sociétés traditionnelles à son institutionnalisation dans les sociétés modernes, et son rôle dans les mouvements sociaux et politiques contemporains.

Les origines de la solidarité : les sociétés traditionnelles

Dans les sociétés primitives et les civilisations anciennes, la survie dépendait fortement de la coopération entre les membres du groupe. La solidarité y prenait souvent la forme d’une entraide économique et sociale, où chaque membre contribuait au bien-être collectif.

Les communautés tribales

Dans les sociétés tribales, la solidarité était principalement fondée sur la parenté et la communauté. Les ressources (nourriture, outils, abris) étaient partagées pour assurer la survie de tous.

Les rituels et les croyances religieuses renforçaient le sentiment de cohésion sociale.

L’entraide familiale et communautaire

Dans l’Antiquité, les familles élargies et les clans avaient une responsabilité mutuelle pour s’assurer que personne ne soit abandonné en temps de besoin (maladie, vieillesse, etc.).

Dans les cités grecques et l’Empire romain, des formes de solidarité existaient sous forme d’aides entre voisins et entre groupes sociaux.

La solidarité dans les religions

La plupart des grandes religions du monde ont toujours prôné l’entraide et la solidarité entre les croyants. Par exemple :

Dans le christianisme, la charité et l’aide aux pauvres sont des devoirs moraux fondamentaux.

Dans l’islam, la Zakat (don obligatoire) est l’un des piliers de la foi et sert à aider les plus démunis.

Dans le judaïsme, la Tzedaka (justice sociale et charité) est un devoir moral envers les pauvres.

La solidarité au Moyen Âge

Le Moyen Âge a vu la naissance de nouvelles formes de solidarité, notamment sous l’influence de l’Église et des premières formes d’organisations professionnelles.

L’influence de l’Église

L’Église catholique a joué un rôle central dans la gestion des œuvres de charité et d’entraide, en organisant des hôpitaux, des hospices, et des distributions de nourriture pour les pauvres et les malades.

Les monastères sont devenus des centres d’accueil pour les voyageurs et les nécessiteux.

Les guildes et corporations

À l’époque médiévale, les guildes de métiers et les corporations ont mis en place des systèmes d’entraide pour leurs membres, garantissant un soutien financier en cas de maladie, de décès ou d’incapacité de travailler. Ces institutions professionnelles constituaient une forme de solidarité corporatiste, limitée à un groupe spécifique mais très efficace pour maintenir la cohésion au sein des métiers.

La révolution industrielle et la naissance de la solidarité moderne

La révolution industrielle des XVIIIe et XIXe siècles a bouleversé les sociétés, provoquant des inégalités économiques massives et des conditions de vie difficiles pour les ouvriers. Ces bouleversements ont donné lieu à de nouvelles réflexions et actions autour de la solidarité.

Les premières révoltes ouvrières

Les conditions de travail dans les usines étaient souvent inhumaines : longues heures de travail, salaires très bas, absence de protection sociale. Les premières formes de solidarité ouvrière sont apparues avec les grèves et la formation des syndicats, qui cherchaient à défendre les droits des travailleurs.

L’émergence de la protection sociale

Des penseurs comme Karl Marx et Friedrich Engels ont dénoncé les injustices du capitalisme et plaidé pour une solidarité internationale des travailleurs. Les premières législations sociales voient le jour, notamment en Allemagne sous l’impulsion de Bismarck, avec l’introduction de systèmes d’assurance maladie, retraite et accident pour les ouvriers.

Le rôle des idéologies socialistes et anarchistes

Au XIXe siècle, les idéologies socialistes et anarchistes se sont développées autour de l’idée que la solidarité devait être institutionnalisée à travers des systèmes sociaux qui protègent les plus faibles et réduisent les inégalités.

Ces mouvements ont prôné des réformes économiques et sociales profondes, qui ont influencé les futures politiques de l’État-providence.