La nudité constitue un élément essentiel dans la mise en scène de Thomas Ostermeier : le comédien n’hésite pas à se dénuder sur scène suscitant un certain malaise dans le public face à l’obscénité et à la crudité de la situation. Mais le jeu de Lars Eidinger dédramatise cette situation auprès des spectateurs et fait rapidement oublier avec humour toute érotisation du corps, toute sensualité sur scène, d’autant que le personnage se caractérise par sa difformité et sa laideur. Le corps n’est qu’un instrument de manipulation pour parvenir au pouvoir : Richard se met à nu au sens propre et au sens figuré, se dévoile devant Anne afin de la déstabiliser et de lui faire croire qu’il est sincère, lui tend l’arme pour qu’elle venge le meurtre de son père. Le corps nu de Richard n’est pas sans rappeler la nudité du Christ sur la croix afin d’apitoyer lady Anne, jouée par Jenny Konig.
La nudité du personnage laisse apparaître cette bosse représentée par un accessoire de couleur noire que le comédien porte sur l’épaule arrière. La noirceur de la bosse semble n’être qu’un prétexte pour expliquer la noirceur de son âme quand le personnage évolue sur scène avec aisance, sans boiter. Richard n’est que le reflet de ce qui est enfoui en l’homme et rien ne peut justifier le mal dont il est l’incarnation. La fausse bosse est un leurre qui est révélé par cette mise à nu : son dévoilement symbolise la transparence et la sincérité du discours de Richard et suppose que les masques sont tombés, alors qu’il ne s’agit que d’une stratégie de manipulation.