Le principe comique réside dans le décalage entre un corps et un contexte social sérieux. Ainsi, la comédie joue consciemment à dérégler son propre espace de jeu. Dans Le Quart Livre (1552), Rabelais livre un pastiche grotesque du très sérieux voyage vers le Nouveau Monde. Un siècle plus tard, Corneille s’amusera dans L’Illusion Comique (1635) à ne pas respecter la rigide règle des trois unités édictée par Nicolas Boileau.

Beaumarchais, en présentant dans Le Barbier de Séville (1775), un valet (Figaro) supérieur au maître (Almaviva), inversera le rapport de force sociétal quelques années avant la Révolution française (1789) qui avalisera cette supériorité du peuple sur la noblesse et amènera la Ire République (1792). Une autre révolution, celle de Février (1848), qui conduira à l’abdication de la monarchie de Juillet et au début de la IIe République, permettra à Flaubert de parodier dans Bouvard et Pécuchet (1881) l’envie d’ascension sociale de deux ridicules petits bourgeois.

Le cinéma inventera ses propres règles de détournement, dont la comédie burlesque magnifié par le slow burning de Buster Keaton qui s’ingénue à jouer sur l’étirement du temps avant la chute d’un gag. Charlie Chaplin, dans Le dictateur (1940), jouera subtilement sur l’étirement du son pour railler les discours ampoulés d’Adolphe Hitler. La satire envers le dictateur nazi se poursuit dans To be or not to be (1942) où Ernst Lubitsch multiplie les quiproquos et les sosies pour ridiculiser le dictateur nazi. La joyeuse fiction théâtralisée fait alors consciemment face à la cruelle réalité historique.