Un artiste en son temps : la photographe Tina Modotti (1896-1942)

Tina Modotti était une photographe italienne. Elle a été témoin du Mexique post-révolutionnaire des années 1920. 

Née en Italie en 1896, elle immigre aux États-Unis à l'âge de 17 ans. À San-Francisco, elle devient star du Théâtre italien, puis à Hollywood, elle fait ses premiers pas au cinéma, jouant le premier rôle du film The Tiger's Coast (1920). 

Tina Modotti rencontre alors le photographe Edward Weston, avec lequel elle part s'installer à Mexico, où ils ouvrent un studio photo. C'est Weston qui initie Modotti à la photographie. Cette dernière devient alors une photographe qui met son talent au service de la lutte contre les inégalités, aux côtés du parti communiste mexicain. 

Dans un pays ayant connu une révolution vingt-cinq ans auparavant, Modotti se fait témoin de la misère qui l'environne, tout en montrant la noblesse de ses modèles (femmes pauvres, personnes âgées), dégageant de chacun d'entre eux, des caractéristiques universelles : mains déformées avec l'âge, fierté ou encore dignité.

Tina Modotti était une photographe qui militait dans un contexte mexicain post-révolutionnaire et faisait partie d'un cercle d'intellectuels et d'artistes. Le couple Modotti / Weston était proche de Diego Rivera (muraliste important dont elle photographiera les fresques) et de Frida Kahlo notamment. 

Modotti s'impliquait dans des campagnes pour la libération des prisonniers politiques et la promotion de mouvements de libération internationaux. Les engagements militants de la photographe, au style réaliste social, lui vaudront d'être violentée par la police, accusée d'un meurtre et expulsée du pays en 1930. 

Modotti gagne les rangs des républicains, en Espagne, pendant la guerre civile. Elle se lie d'amitié avec Malraux, Hemingway et Dos Passos notamment. Mais Modotti ne pratique plus la photographie, pensant que cela ne permet pas de changer les choses. En effet, au Mexique, la presse s'était servie des photos de nus que Weston avait faites d'elle pour l'accuser publiquement d'être une femme de petite vertu. Ces photographies sont aujourd'hui entrées dans l'histoire de l'art.

Tina Modotti était engagée dans la révolution culturelle et sociale du Mexique des années 1920. La photographe et militante réalisait à la fois un travail photographique personnel, des photographies d’œuvres d'art mexicaines contemporaines pour l'édition de livres d'art et des travaux de photojournalisme pour le journal du parti communiste mexicain El Machete dans lequel elle montrait des images de dépravation et de pauvreté contrastant avec celles de riches possédants, ou encore de manifestations et de foule dispersée par la police. 

À cela s'ajoutait son activité de photographe plus conventionnelle, de réalisation de portraits pour une clientèle privée, en studio. Le harcèlement policier et médiatique dont elle sera victime renforceront son engagement dans la lutte pour le changement social. En 1991, lors d'une vente aux enchères à New-York, l'une de ses natures mortes intitulée Roses (1925), a été vendue au prix de 165 000 dollars.

Au Mexique, entre 1923 et 1930, Tina Modotti a réalisé deux cent cinquante clichés. Son style photographique est celui d'un réalisme social. Ayant parcouru les rues de Mexico durant des manifestations, avec son Graflex, la photographe a capté des instants pris sur le vif. 

Dans les rues des villes ou le long des chemins de campagne, Modotti a rendu compte des conditions misérables dans lesquelles vivaient une grande majorité de mexicains et, face à ces injustices, son travail est devenu de plus en plus politique. Certaines photographies de Tina Modotti subliment également les lignes épurées de l'architecture (arches du couvant de Tepoztlan par exemple) ou encore la géométrie de motifs floraux. 

La photographe a su éviter le pathos en photographiant ses modèles ouvriers, campaneros, femmes et enfants, toujours dignes. Modotti mettait en évidence les mains des paysans, des blanchisseuses, les sourires des femmes et des enfants, l'intensité de leur regard, tout en faisant ressortir l'universalité du genre humain.