Aventure spirituelle, expérience mystique, la poésie de Michaux explore l’univers intérieur du poète ainsi que sa confrontation avec le monde. L’unité de chaque poème est celle d’un instantané où s’expriment une hantise, une obsession, une angoisse spécifique ; par exemple dans « La Nuit remue », la peur d’être agressé par des êtres effrayants, animaux, objets ou monstres femelles.
La condition humaine est métaphorisée par des images cruelles, ainsi celle des galériens manquant de vivres et exposés à des assassins. La lutte pour la survie impose le combat frontal, comme dans « L’Âge héroïque » ou le recours à la ruse comme à la fin de « L’Éther » : « Je vais t’écarteler ! ».
Le moi, en butte à l’hostilité des autres perçus comme des parasites (dans « La Vie de l’araignée » par exemple) ne peut qu’explorer toutes les possibilités de résistance, faute de pouvoir y échapper. Devenir aussi flasque et passif qu’un chiffon, réduire l’autre à néant, se recroqueviller dans l’onirisme sont autant de recours à l’évitement.
L’idéal baudelairien de Michaux est donc celui du froid, des lointains septentrionaux et insulaires, symbolisés par les icebergs.
La Nuit remue – Henri Michaux
🎲 Quiz GRATUIT
La Nuit remue 1
La Nuit remue 2
La Nuit remue 3
📝 Mini-cours GRATUIT
Michaux et le surréalisme
Michaux écrit à la même période que les poètes surréalistes, entre les deux guerres, et a pour origine la Belgique, centre important du mouvement avec Paul Nougé, Magritte ou Fernand Dumont. Sa modestie intellectuelle, son refus de tout engagement tapageur l’ont toutefois éloigné de toute école, fût-elle révoltée ou anti-académique.
Son exploration du domaine mental de l’homme, ses visions fantasmatiques, le climat angoissé de son univers ont de fortes analogies avec l’exploration de l’inconscient d’un Queneau, d’un Breton ou, au cinéma, d’un Bunuel. Ses cauchemars paranoïaques rappellent leur grand modèle Lautréamont : il décrit la crainte d’être absorbé par un parasite, envahi par la foule, dévoré par une femelle…
Loin de toute écriture automatique et de la confiance en l’amour d’une femme qui permette de réaliser tous les désirs, Michaux a néanmoins la métaphore incongrue en commun avec les surréalistes, qui rapprochent deux réalités éloignées ou incompatibles, au risque de l’absurde.