Après la Seconde Guerre mondiale, le renouveau de la sociologie

Après la Seconde Guerre mondiale, les grands courants de la sociologie se sont démarqués par leur tendance à dépasser les grandes oppositions théoriques qui avaient structuré la matière durant la première moitié du XX^e siècle (société contre individu, holisme contre individualisme, objectivisme contre subjectivisme, etc.). Les travaux de Norbert Élias, précurseurs, doivent être cités.

Ensuite, la sociologie contemporaine est surtout influencée par trois courants correspondant à des traditions théoriques et des objets empiriques très différents : l’analyse stratégique de Michel Crozier et Erhard Friedberg, la sociologie de Pierre Bourdieu et la théorie de la structuration d’Anthony Giddens. D’autres courants théoriques ont pour originalité de se concentrer sur un point de vue microsociologique et une démarche ethnographique. Aussi la sociologie actuelle est-elle souvent qualifiée de « sociologie au plus près des acteurs » avec l’interactionnisme symbolique et l’ethnométhodologie, la sociologie pragmatique, autour des travaux de Luc Boltanski, et la sociologie de l’acteur-réseau de Bruno Latour.

L’évolution est donc forte dans la façon d’étudier et de penser la société, ses conflits et ses inégalités. Plutôt qu’une approche en termes de classes sociales, la sociologie se concentre de plus en plus sur d’autres constructions sociales et d’autres formes de différences qui sont à l’origine des rapports de pouvoir entre groupes sociaux. Sont notamment concernés le genre, la race, l’orientation sexuelle ou encore le handicap.

Depuis les années 1960, la sociologie est donc entrée dans une nouvelle ère. Les mots clés sont désormais, même s’il existe toujours quelques différences entre les pays, institutionnalisation, expansion, sectorisation, bureaucratisation, internationalisation. L’institutionnalisation de la sociologie se renforce, des liens multiples la consolident, tandis que ses fonctions, ses secteurs de recherche, ses lieux d’activité se multiplient et se divisent.

Les pratiques sont donc de plus en plus diverses et variées, de plus en plus libres d’une certaine façon. Les traditions scientifiques sont de moins en moins respectées, ce qui permet d’envisager de nouveaux horizons, mais ne manque pas de susciter quelques tensions. D’une part, le scepticisme et le postmodernisme remettent en cause l’idée même de scientificité, cela en raison de l’aspect nécessairement local et culturel de toute entreprise de connaissance sociologique. D’autre part, le cognitivisme et les rapports avec l’intelligence artificielle, les neurosciences, la biologie et la psychologie engendrent un mouvement de naturalisation de la recherche sociologique.