Michel Crozier

Michel Crozier est un sociologue français, né en 1922 et mort en 2013. On retient son nom car il est le principal concepteur de l'analyse stratégique et de l'action collective en sociologie des organisations. Dans L’Acteur et le Système, publié en 1977 avec Erhard Friedberg, il décrit les éléments d'une théorie organisationnelle de l'action collective. Cette théorie a pour objectif de mettre à profit l'approche utilisée pour l'analyse des organisations dans le cadre de l'examen des systèmes d'action qui sous-tendent l'action collective, en dehors du cadre formel des organisations. Cette approche élargie a connu une grande postérité et permis de mettre sur le devant de la scène, en France, la sociologie de l'action, et de renouveler l'enseignement et la recherche en sociologie.

Selon Michel Crozier, la théorie sociologique ne saurait se suffire à elle-même, n’a guère d’intérêt si elle n’est pas mise à profit afin de générer des connaissances pratiques. La sociologie doit être un outil du changement en offrant aux personnes concernées les moyens de mieux comprendre la situation dans laquelle ils se trouvent et donc de mieux pouvoir l’influencer et la faire évoluer.

Michel Crozier s’est fortement engagé dans le groupe des intellectuels autour de la revue Esprit. Il a toujours souhaité que ses activités scientifiques coïncident avec un engagement concret pour la réforme de la société et de l'État. En témoignent ses ouvrages La Société bloquée (1970), On ne change pas la société par décret (1979) et État modeste, État moderne (1987).

Dans ces travaux, Crozier a notamment souligné combien les acteurs positionnés dans une situation bureaucratique en viennent souvent à perdre beaucoup en efficacité en raison des contraintes réglementaires qui les entourent et brident leur marge d’action et d’initiative. Paradoxalement, le fait que les règles paralysent l'action de presque tous les acteurs permet à quelques-uns d'entre eux de prendre une parcelle de pouvoir, en dehors ou à côté de ce qui est prévu par les règlements. En retour, l'organisation édicte de nouvelles normes afin d’empêcher ou encadrer ces prises de pouvoir incontrôlées. Ces nouvelles normes, qui viennent se surajouter aux précédentes, génèrent chez l'employé une routine néfaste à son efficacité. La bureaucratie peut donc être définie telle « une organisation qui n'arrive pas à se corriger en fonction de ses erreurs ».