Le grand peintre Cézanne disait « la recherche de la nouveauté et de l’originalité est un besoin factice [faux, artificiel] qui dissimule la banalité et l’absence de tempérament ». Si l’innovation est généralement prisée, valorisée, elle rencontre aussi des détracteurs pour différentes raisons.
Tout d’abord, l’innovation peut n’être qu’apparente. Nombreuses prétendues innovations ne sont que des coups de publicité qui n’apportent rien de neuf : « neuf fois sur dix, le nouveau n’est que le stéréotype de la nouveauté » (Roland Barthes).
De plus, l’innovation n’est pas bonne en soi : elle peut servir à détruire ou à asservir. Claude Lévi-Strauss raconte, dans Tristes tropiques, comment un chef de tribu a su tirer parti de la découverte de l’écriture. Il a fait semblant de savoir écrire pour subjuguer les siens. La nouveauté est aussi une arme de domination, réelle et symbolique.
Enfin, l’innovation peut déstabiliser un ordre social et économique, poser des problèmes éthiques et sociaux. Le philosophie Paul Valéry dit très bien en ce sens : « L’homme sait assez souvent ce qu’il fait, mais il ne sait jamais ce que fait ce qu’il fait ». C’est reconnaître que les conséquences des inventions dépassent généralement, voire nécessairement, les intentions des inventeurs. Pensons à la façon dont l’invention de la voiture automobile a peu à peu modifié non seulement nos manières de nous déplacer, mais plus profondément nos manières de vivre : les commerces se sont installés hors des centres-villes, les distances entre le domicile et le lieu de travail se sont accrues… au point qu’on a pu soutenir que la voiture, loin de faire gagner du temps, nous en faisait perdre.