« Madame Bovary, c'est moi, d’après moi ! » aurait déclaré Flaubert à propos de son personnage. Cette citation, bien que non avérée, mais devenue mythique, révèle toutefois la volonté d’établir la profonde connexion entre l'auteur et son personnage principal. Dans une lettre du 18 décembre 1856, Flaubert affirme en effet : « Je me suis identifiée à son existence au point qu’il me semblait que c’était elle et que c’était moi ! », tout en prônant le style de l’impersonnalité, de l’écriture objective, doctrine suivant laquelle l’auteur doit être absent de son œuvre : « l’auteur, dans son œuvre, doit être, comme Dieu dans l’univers, présent partout et visible nulle part » (Lettre à Louise Colet, décembre 1852). Il ajoute, à la suite à l’acquittement prononcé lors du procès pour immoralité contre Madame Bovary, dans une lettre adressée à Mlle Leroyer de Chantepie en 1857 : « Madame Bovary n’a rien de vrai. C’est une histoire totalement inventée […] Je n’y ai rien mis ni de mes sentiments ni de mon existence. L’illusion (s’il y en a une) vient, au contraire, de l’impersonnalité de l’œuvre. C’est un de mes principes qu’il ne faut pas s’écrire. » L’écriture objective se traduit par l’absence d’un narrateur omniscient : Flaubert effectue des changements de points de vue en recourant à la focalisation interne. Il use, pour cela, de l’emploi du style indirect libre qui rend flou la frontière entre narrateur et de nombreux passages descriptifs qui révèle le souci du détail de l’auteur, mais aussi d’éviter une narration subjective. Le recours à l’ironie, la fameuse ironie flaubertienne, permet de conserver une distance entre l’auteur et son récit, tout comme la présence des clichés, des stéréotypes ou encore des idées reçues.

En outre, bien qu'influencé par le romantisme dans sa jeunesse, l’œuvre flaubertienne s'inscrit dans le courant réaliste et se caractérise par un traitement désabusé et réaliste de sujets apparemment ordinaires, voire dérisoires : Flaubert choisit des personnages du quotidien - une femme de médecin de province, un étudiant indécis, des bourgeois prétentieux - pour explorer les illusions romantiques et les désillusions de la vie. Son style caractérisé par l’ironie et le détachement, critique les aspirations au romantisme qu’il confronte à la réalité prosaïque, comme l’illustrent la désillusion d'Emma baignée depuis l’adolescence dans la lecture des romans sentimentaux tels Paul et Virginie de Bernardin de Saint-Pierre ou l’attitude pragmatique de son mari Charles Bovary, caricature du bourgeois de province, loin du cliché de l’amant romantique. Enfin, son observation minutieuse de la société se mêle à une écriture précise et travaillée, ce qui fait de Flaubert une figure centrale du réalisme littéraire, marquant une transition importante entre le romantisme et une vision plus désenchantée du monde.