Avec la Renaissance, l’Europe redécouvre l’héritage de l’Antiquité et voit naître l’humanisme. En France, cette période impose aussi le français comme langue officielle et les poètes de la Pléiade vont œuvrer pour donner au français ses lettres de noblesse dans le but de rivaliser avec les langues anciennes. Mais si la Renaissance marque la fin du Moyen-Âge, elle marque aussi celle du théâtre médiéval car, après avoir fait renaître le théâtre à l’intérieur même de son enceinte, l’Église va le fustiger violemment.
En 1548, le parlement de Paris fait interdire les mystères à cause des débordements que les auteurs se permettaient. Quant aux comédies, elles seront également interdites par le Parlement entre 1588 et 1594. Comme jadis, les comédies populaires survivent grâce notamment aux mimes.
En 1549, dans Défense et illustration de la langue française, le poète Joachim Du Bellay écrivait : « Quant aux comédies et aux tragédies, si les rois et les républiques les voulaient restituer en leur ancienne diginité, qu’ont usurpée les farces et les moralités, je serais bien d’opinion que tu t’y employasses, et si tu veux le faire pour l’ornement de ta langue, tu sais où tu en dois trouver les archétypes » (Livre I, chap. 4).
Dès lors, le théâtre de la Renaissance va principalement se tourner vers la tragédie et ses représentations seront essentiellement pour la cour. Les tragédies antiques sont le modèle à atteindre et on voit fleurir de nombreuses traductions des Anciens.
La première tragédie en langue française qui ne soit ni une traduction ni une adaptation grecque ou romaine date de 1550. Il s’agit d’Abraham sacrifiant de Théodore de Bèze représentée à Lausanne. Pourtant, même si l’auteur emprunte à Euripide la structure de la tragédie grecque classique, le traitement de son sujet reste très proche de celui des mystères.
En France, Étienne Jodelle, poète et dramaturge membre de La Pléiade, écrit la première tragédie en cinq actes en langue française et en alexandrin à la manière des Anciens. Sa Cléopâtre captive est représentée à l’Hôtel de Reims devant le roi Henri II, ainsi que L’Eugène, une comédie à l’antique également.
Si Étienne Jodelle est considéré comme précurseur du théâtre français classique, le dramaturge qui ne doit pas être oublié est Robert Garnier. Étonnamment, Garnier a été avocat du roi au Parlement de Paris, puis haut fonctionnaire d’État. Parallèlement à sa carrière professionnelle, il écrit des poèmes amoureux et des tragédies s’inspirant des mythes grecs et romains. En 1583, avec sa tragédie Les Juives, le dramaturge emprunte un sujet biblique, la prise de Jérusalem par le roi de Babylone Nabuchodonosor, pour refléter les massacres des guerres de religion de son époque. La pièce de Robert Garnier renoue à la fois avec les origines sacrées du théâtre médiéval et avec celles de la tragédie antique puisque, face à de tels massacres, l’homme est en prise à une réflexion sur le poids de sa responsabilité. Le dramaturge livre une pièce atemporelle et universelle rivalisant avec les tragédies antiques.