Zola définit le naturalisme comme une « formule de la science moderne appliquée à la littérature ». Ce courant se base sur les recherches et les progrès scientifiques propres à la deuxième moitié du siècle. Le romancier se fait observateur de la nature humaine.
Les travaux de Claude Bernard (1813-1878), médecin et physiologiste français, considéré comme le fondateur de la médecine expérimentale, intéressent les romanciers. Il tente d’expliciter les relations de cause à effet qui existent entre les milieux et les personnages, et d’étudier l’hérédité. La démarche scientifique s’oriente essentiellement sur la diversité sociale.
Le romancier naturaliste, et plus particulièrement Zola, doit connaître les milieux avec précision. Après s’être documenté, il compose un vaste arbre généalogique dans lequel figurent tous les membres de la famille des Rougon-Macquart. Les Rougon-Macquart sont marqués par une double hérédité :
- La folie
- L’alcoolisme.
Evoluant dans différents milieux, ils deviennent de véritables sujets à observer. Ainsi, Gervaise évolue dans le milieu des blanchisseuses : Zola montre, dans L’Assommoir, sa déchéance progressive et la détérioration de sa famille sous l’effet de l’alcool. Dans Germinal, Etienne Lantier, son fils, évolue dans le milieu de la mine, dans le Nord de la France, en pleine crise industrielle ; Jacques Lantier, son second fils, dans le milieu ouvrier, dans La Bête humaine : il est marqué par l’hérédité familiale de la folie. Il a le désir enfoui de tuer. Claude Lantier, dans L’Œuvre, évolue lui dans le milieu de l’art. Nana, sa fille, se prostitue pour tenter d’échapper à son triste destin. Elle incarne dans le roman éponyme, la société corrompue du Second Empire. Eugène Rougon, dans le milieu politique, participe au coup d’État du 2 décembre 1851, entre au Sénat et au Conseil d’Etat et finit ministre de l’Intérieur. Son ascension politique est décrite dans Son Excellence Eugène Rougon. Aristide Saccard, dans La Curée, évolue dans le milieu de la spéculation immobilière dans le Paris du Second Empire, celui des transformations urbaines et architecturales.
Comparant son œuvre à celle de Balzac, Zola déclare dans Documents et plans préparatoires (1870) :
« Mon œuvre sera moins sociale que scientifique. Balzac, à l’aide de trois mille figures, veut faire l’histoire des mœurs : il base cette histoire sur la religion et la royauté (…) Mon œuvre, à moi, sera tout autre chose. Le cadre en sera plus restreint. Je ne veux pas peindre la société contemporaine, mais une seule famille, en montrant le jeu de la race modifiée par les milieux ».
La volonté de Zola de montrer des êtres singuliers étudiés dans les moindres détails connaît tout de même quelques écueils. Le romancier est victime de nombreuses critiques, dont celle qui consiste à lui reprocher de ne s’intéresser qu’à l’ « ordure » sociale et de faire de la littérature « putride ». On lui fait remarquer que les hommes ne sont pas des sujets de laboratoire sur lesquels il peut agir. La démarche scientifique du roman est limitée car le romancier transforme la documentation en fiction. La démarche naturaliste est vouée à l’échec dans la mesure où le roman est trop marqué par la science.