Inspiré des surréalistes et des dadaïstes, ce mouvement est catégoriquement opposé au réalisme. Eugène Ionesco, Samuel Beckett, Arthur Adamov, Jean Genet, voire Harold Pinter sont les auteurs de l’absurde les plus représentatifs de cette déstructuration générique du théâtre, qui renoue avec le tragique antique, l’obstacle du sens du monde qui échappe à l’homme, et contre lequel, le plus souvent, il se trouve démuni. Ainsi, Ionesco exprime-t-il une vision noire et d’une lucidité désenchantée dans Le Roi se meurt (1962), relatant le refus de mourir de Béranger Ier, par une fable métaphysique. C’est la représentation d’un univers sans communication, le langage ne référant plus au réel (ainsi du logicien dans Rhinocéros, 1959, de Ionesco). Cependant, Samuel Beckett a toujours démenti appartenir à ce courant, malgré ses pièces En attendant Godot (1952) et Fin de partie (1957). Mais, si lui-même s’en défend, il compose des pièces à tonalité tragique et absurde, littéralement paralysées, corsetées dans la gangue de didascalies, parfois plus longues que le texte lui-même.
En attendant Godot (1952) relate l’attente de Godot (Dieu ?), qui ne vient jamais et Fin de partie (1957) met en scène quatre personnages handicapés physiquement qui habitent dans une maison située dans un monde désert, dévasté et apocalyptique. Oh les beaux jours (1962, en français), titre ironique, met en scène la paralysie d’un couple âgé, Winnie et Willie, attendant la mort, et englué littéralement dans un décor, en forme de butte : « Dans une étendue désertique d’herbe brûlée se dresse un petit mamelon aux pentes douces dans lequel Winnie est enterrée, d’abord jusqu’au-dessus de la taille ». L’absurde de Beckett naît bien de ce constat d’une absence de transcendance qui guiderait les hommes, qui passent le temps dans la répétition mécanique de gestes : « Tout s’est vidé, laissant place au moindre et à son activité minimale. Plus aucune transcendance ne peut intervenir sur scène. »