Le roman peut se définir comme un univers fictionnel qui peut refuser le monde référentiel, soit par hétérochronie, fait de déplacer dans une autre (hétéros) temporalité (chronos), soit par hétérotopie, fait de situer l’histoire dans un autre (hétéros) lieu (topos). Ainsi, cette volonté de se dépayser temporellement ou spatialement, liée à la narration d’exploits qui dépassent le cadre du quotidien, porte le lecteur à quitter le monde référentiel pour y substituer le monde de la fiction.
On peut donc distinguer plusieurs voies : au Moyen-Âge, le héros est une figure non pas réelle, mais symbolique, dans les trois fonds thématiques, « la matière de France », autour des personnages carolingiens légendaires (Chanson de Roland, au XIe siècle, suivie, au début du XIIe siècle, de la Chanson de Guillaume), « la matière de Rome », autour des personnages exemplaires de l’Antiquité (Roman d’Alexandre (1110-1120), peut-être par Alberic de Pisançon, Les Sept Sages de Rome (1155), Le Roman de Thèbes (v. 1155), qui est une réécriture du mythe antique d’Étéocle et de Polynice, d’après La Thébaïde (vers 90) de Stace (40-96), le Roman d’Énéas (vers 1156), enfin, « la matière de Bretagne », autour du cycle du roi Arthur, ensemble de romans autour du roi Arthur, de son entourage et de la quête du Graal.
Ce cycle littéraire merveilleux se nourrit de plusieurs versions différentes de la légende du roi Arthur. Elle est surtout développée par Chrétien de Troyes à travers ses ouvrages : Érec et Énide (vers 1160-1164), Cligès ou la Fausse Morte (vers 1176), Lancelot ou le Chevalier à la charrette (vers 1178-1181), Yvain ou le Chevalier au lion (vers 1180), Perceval ou le Conte du Graal (vers 1182-1190).
Au XVIe siècle, la veine facétieuse rabelaisienne parodie les héros médiévaux avec ses personnages de géants, sa parodie héroï-comique de l’épopée et du roman de chevalerie, en cinq tomes, considérée comme une des premières formes du roman moderne, avec Pantagruel (1532) et Gargantua (1534), Le Tiers Livre (1546), Le Quart Livre (partiel en 1548, puis complet 1552) et enfin Le Cinquième Livre (posthume, partiel en 1562, puis complet 1564).