Éléments de syntaxe : l’ordre des mots

L’ordre des mots en français moderne dépend de leur fonction dans la phrase. Les mots dans la phrase déclarative suivent ordinairement l’ordre suivant : sujet + verbe + complément. L’ordre sujet + verbe s’inverse dans la phrase interrogative dans la langue soutenue. Dans le cas de l’ancien français, l’ordre des mots est assez libre, puisque ceux-ci sont déclinés : le cas du mot indique sa fonction au sein de la proposition. Mais, progressivement, des règles tendent à s’instaurer dans la syntaxe de la phrase de l’ancien français.

Ces règles peuvent reposer sur des lois rythmiques : commencement de la phrase par un mot tonique faisant position (pronoms personnels, souvent sujets, syntagme nominal ou adverbial). La proposition ne peut donc débuter par un mot atone (préposition, conjonction ou pronom faible). Les interjections, les exclamations ou nom en apostrophes sont hors phrase, tout comme les mots de liaison qui sont considérés comme extérieurs à la phrase et sans influence sur la place du sujet par rapport au verbe. Le verbe se place obligatoirement en deuxième position.

Sur le plan syntaxique, le verbe placé en deuxième position implique la possibilité de placer son sujet et ses compléments devant ou derrière lui. L’ordre le plus fréquent en ancien français est le suivant : COMPLÉMENT – VERBE – SUJET.

Le verbe est précédé par un syntagme nominal qui présente la fonction de complément d’objet (direct ou indirect), d’attribut, de complément circonstanciel, un adverbe ou un pronom. Placé en première position, l’adverbe permet de relier la proposition à ce qui précède, de marquer son articulation logique en exprimant un rapport de temps de cause ou de conséquence, tout comme le démonstratif ou l’indéfini à valeur anaphorique peut l’induire. Cette proposition implique la postposition du sujet par rapport au verbe, voire son omission dans le cas d’un pronom jusqu’au XIII^e siècle, époque où il se généralise à cette place en prose.

Le sujet ne peut être antéposé au verbe que très rarement jusqu’au XIII^e siècle selon l’ordre : COMPLÉMENT – SUJET – VERBE.
Cette possibilité se présente dans les propositions subordonnées relatives introduites par un pronom régime (ex. : que), dans les phrases dont le complément en première position est une subordonnée, et tout particulièrement en poésie, dont la syntaxe dépend du rythme et de la métrique, mais aussi dans les indépendantes dont le premier mot est un adverbe de discours avec une valeur appréciative ou énonciative.
L’ordre des propositions subordonnées relatives, conjonctives, complétives ou circonstancielles correspond généralement à l’ordre : SUJET – COMPLÉMENT – VERBE.
Cette structure apparaît également dans les phrases dont le complément est un adverbe de lieu, de temps, de manière ou de quantité.

Le verbe peut être employé en première position selon l’ordre : VERBE – SUJET – COMPLÉMENT.
C’est une construction qui ne se rencontre pas fréquemment dans la mesure où il correspond à un sujet incomplet notamment dans les interrogatives totales, les incises, les phrases qui introduisent le discours direct, les phrases injonctives à l’impératif et optatives au subjonctif, dans les indépendantes qui présentent une relation circonstancielle avec les propositions qui les suivent sans mot de liaison.

En revanche, l’insertion d’un complément entre le verbe et le sujet est très peu représentée en ancien français, excepté quand le complément est un pronom non prédicatif, selon le schéma : VERBE – COMPLÉMENT – SUJET.

Enfin, la disposition la plus rare en ancien français devient un modèle-type en moyen français avant de devenir la règle en français moderne dans les phrases déclaratives, dans la mesure où, avec la disparition des désinences, c’est l'ordre des mots dans la phrase qui permet d’identifier le sujet par rapport au verbe en vertu des règles grammaticales établies.