La femme, en effet, apparaît dominée par ses sens, son envie : Chimène, dans Le Misanthrope, jeune veuve qui multiplie les conquêtes, ou encore Phèdre, chez Racine, tourmentée par le désir incestueux pour son beau-fils. Elle est aussi toujours excessive, comme l’écrit La Bruyère : « Les femmes sont extrêmes : elles sont meilleures ou pires que les hommes » (« Des femmes », 53). En un mot, elles sont éloignées de l’équilibre qu’incarne l’honnête homme. En ce sens, l’honnête femme demeure un idéal moral patriarcal.
Le poids de la morale est tel que la Princesse de Clèves, héroïne éponyme du roman précieux de Mme de Lafayette, sacrifie son amour sur l’autel de la morale pour l’homme qu’elle aime, Nemours, alors que son mari est mort. La femme, ainsi, chez Mme de Lafayette, sacrifie toujours son amour sur l’autel des conventions, ou bien est épousée sans son consentement, sacrifiée, comme un meuble, lors d’échanges matrimoniaux.
Seules certaines salonnières célèbres, qui agrègent autour d’elles les esprits de leur temps défient cette misogynie, ou ce rôle passif : les salons de Madeleine de Scudéry, autrice anonyme du roman Clélie, de plus de 10 000 pages, grand succès littéraire, ou bien de Madame de Sablé, auquel participe La Rochefoucauld et Mme de Lafayette. À l'exception de ces dernières, peu de femmes sont connues pour leurs écrits, ou bien, alors, pour des genres dits mineurs, comme le genre épistolaire dont Mme de Sévigné est considérée comme maîtresse.
Peu d’horizon donc pour la femme, pourtant grande lectrice et spectatrice de la production littéraire de son époque, l’art leur permettant, un temps, de s’échapper de leur vie morne.