La mondialisation, extension du système capitaliste au monde, selon le géographe Laurent Carroué, spécialiste du sujet et de la « planète financière », suppose des flux matériels de marchandises et de personnes, mais aussi immatériels d'informations et financiers. Les flux financiers constituent en réalité des flux d'informations, les ordres de virements, de transferts et d'investissements étant réalisés sous forme de 0 et de 1 codés en langage informatique. La mondialisation des flux de capitaux révèle une nouvelle géographie économique.

Les flux boursiers partent des investisseurs répartis sur les territoires du monde entier en direction des bourses ; un certain tropisme national existe : les entreprises du CAC40, en France, ont ainsi plus de capitaux français qu'une entreprise lambda, tandis que les entreprises cotées à Shanghai ont plus de capitaux chinois. Les flux circulent ensuite des bourses vers les territoires pour payer les salaires, investir, acheter des produits ou des biens immobiliers. Surtout les flux circulent entre bourses, constituant une véritable planète financière interconnectée. Les États-Unis dominent cette mondialisation économique et financière depuis au moins le tout début du XXe siècle. Ce n'est pas un hasard si la crise de 1929, qui part d'un Krach boursier le jeudi noir à Wall Street, devient la première véritable crise économique mondiale en se propageant notamment au Vieux continent via l'exposition des banques autrichiennes, allemandes et britanniques. La crise des subprimes en 2008-2009 est un autre syndrome de la dépendance du monde aux bourses états-uniennes. New York est la capitale mondiale, avec deux bourses : alors que le Nasdaq cote les valeurs de la technologie, Wall Street domine pour les autres entreprises. La City et les autres grandes places financières des pays développés (Bourse de Tokyo, Euronext centrée autour de Paris) restent puissantes, mais elles sont de plus en plus concurrencées par la bourses émergentes, notamment asiatiques : Shanghaï et Hong-Kong occupent les 4e et 5e rangs mondiaux en termes de capitalisation (autour de 7 000 milliards chacune), loin derrière Wall Street (26 000 milliards) et le Nasdaq, derrière Tokyo, mais devant la City londonienne et la Chine place une troisième bourse dans le top 10 (Shenzhen, porte d'entrée de l'ouverture chinoise, en 8e position). C'est le seul pays à le faire. Des micro-États (Panama, Bahamas) et micro-territoires dépendants (îles vierges britanniques) se placent sur la carte de la mondialisation financière en accueillant des sociétés écrans et favorisant l'évasion fiscale par la non ou faible taxation qu'ils offrent. Ces paradis fiscaux reposent sur le secret bancaire et les lobbys empêchent leur disparition, malgré les pressions, renforcées depuis la crise des dettes publiques consécutive à celle des subprimes de 2008-2009.

La mondialisation repose aussi sur les Investissements Directs à l'Étranger. Malgré quelques différences, la géographie des IDE entrants (inflows en anglais) et sortants (outflows) présente des points communs : en effet, les grands pays développés sont à la fois les principaux pôles émetteurs et récepteurs, et l'Union européenne, notamment la France, est très bien classée, tout comme les États-Unis. La principale différence est une concentration plus forte des IDE sortants depuis les pays riches ; en effet, ils disposent des capitaux pour investir dans le reste du monde, pays développés, comme grands émergents (pour leur marché) et Pays les Moins Avancés (pour leurs ressources, y compris leur main-d’œuvre peu coûteuse). À l'inverse, malgré un développement, les capitaux des grands émergents restent moins nombreux et a fortiori ceux des pays les plus pauvres. Les IDE permettent de contrôler des filiales à l'étranger et transforment les entreprises en véritables Firmes Multi-Nationales ou Trans-Nationales, réalisant une partie significative de leur chiffre d'affaires hors de leur pays d'origine et dans plusieurs pays. Pour le pays récepteur, les IDE permettent de créer des emplois et de moderniser les outils de production. La plupart des États tentent donc d'attirer les IDE, quand bien même des restrictions ont longtemps perduré, voire perdurent encore dans certains États (limitation des IDE étrangers à 49 % des projets pour conserver un droit de regard et une minorité de blocage). Dans certains secteurs stratégiques comme l'armement, le contrôle des IDE est strict au nom de la souveraineté nationale, mais cette notion peut s'étendre à d'autres cas (pressions en France pour conserver les grandes entreprises sous pavillon et donc sous capital national, comme les chantiers navals STX de Saint-Nazaire, par exemple).

Enfin la géographie des flux de capitaux relève non seulement des entreprises, mais aussi des individus. Les touristes dépensent des milliards de dollars à l'étranger (principalement dans les pays développés et les grands émergents, par ailleurs les principaux émetteurs, l'Europe représentant près de la moitié des touristes internationaux émis et reçus) tout comme, via le numérique, tous les individus faisaient des achats en ligne. Les migrants envoient des remises (ou remesas), transferts de fonds vers leur famille et leur pays d'origine, qui passent notamment par des acteurs privés traditionnels (Western Union) ou liés au numérique et plus récents. Ces remises, qui partent des pays développés où se concentrent les migrants, ainsi que des pays du Golfe (où les étrangers sont parfois plus nombreux que les nationaux et font tourner les secteurs du pétrole et du BTP, évités des ressortissants locaux), constituent des aides indispensables pour de nombreux pays d’Amérique latine (notamment en Amérique centrale comme le Honduras et Haïti dans les Antilles, avec jusqu’à 25 % du PIB), mais aussi d'Europe de l'Est (Moldavie) ou d'Asie du Sud (Inde) et du Sud-Est (Indonésie). La dépendance est d'autant plus forte que le pays de départ est pauvre. Néanmoins, le caractère positif de ces remises est discuté ; souvent, l'argent reçu n'est pas investi dans le développement et les montants, déconnectés du pouvoir d’achat local, favorisent une économie de rente et l’attente de l’argent facile.