Le secteur secondaire de la tripartition économique de Colin Clark (1947) comprend à la fois l'industrie manufacturière, soit l'industrie au sens strict, et au secteur de la construction (BTP). L'industrie est traditionnellement divisée entre une industrie légère et une industrie lourde, et les pays développés étaient dits industrialisés. Mais, depuis plusieurs décennies, l'industrie a changé de forme et de localisation, en raison de la Division Internationale du Travail (DIT) ou Division Internationale du Processus de Production (DIPP) comme l'ont notamment montré les travaux des géographes Laurent Carroué et François Bost.
Les pays des Nords ont connu une désindustrialisation marquée. Dans les pays communistes (ex-URSS), cela s'explique par la transition économique et la faible compétitivité des vieilles usines ; dans les pays à économie de marché, de longue date, le recul de l'industrie s'explique par l'augmentation de la productivité et la baisse des coûts de transport. L'augmentation de la productivité est plus rapide dans l'industrie que dans l'agriculture et a fortiori dans les services comme le montrait déjà, en 1963, l'économiste Jean Fourastié. La désindustrialisation concerne donc bien plus le volume d'emplois que celui de production ; ainsi, en France, entre 1945 et 2020, la valeur ajoutée de l'industrie n'a fait que croître (sauf en 2009), tandis que l'emploi s'est contracté, les usines se modernisant et produisant plus avec moins de personnel. En outre, la désindustrialisation de l'emploi s'explique par le recours à la sous-traitance : les entreprises se recentrent sur leur cœur de métier et certains emplois (sécurité, gardiennage, publicité) sont externalisés et ces emplois relèvent désormais des emplois de services aux entreprises (B to B : business to business) ; ainsi, en France, si 1,2 million d'emplois industriels ont disparu dans les années 1990 et 2000, autant ont été créés dans les services aux entreprises. Les usines changent donc de forme et de taille : elles sont plus modernes et plus petites. Les usines « blanches », robotisées et propres, intensives en capital et en technologie, mais pas en main-d'œuvre, remplacent les usines « noires » des deux révolutions industrielles (sidérurgie avec son charbon, chimie avec son pétrole).
En outre, l'abaissement des coûts de transport a permis de produire à l'autre bout du monde. Les activités à haute valeur ajoutée (conception, Recherche et Développement) restent dans les pays du Nord, et en particulier dans des lieux aux aménités valorisées (ex : I-Phone conçu dans la Silicon Valley en Californie, aux États-Unis, technopôle de Nice Sophia Antipolis en France), tandis que les phases de production gourmande en main-d'œuvre moins qualifiée (textile, une partie de l'industrie lourde) sont délocalisées dans des pays à bas coût de main-d'œuvre (Foxconn en Chine produit les téléphones Apple). L'ouverture de la Chine dans les années 1980 a fait du pays le plus peuplé du monde (jusqu'en 2023) l'atelier du monde. Si les délocalisations au sens strict (fermeture d'une usine dans un pays avec réouverture simultanée dans un autre pays) sont rares (5 % des pertes d'emploi industriel), la DIT met en compétition les usines du monde entier. La fermeture d'usines Renault ou Peugeot en France, et le fait qu'elles perdent des emplois s'expliquent par le fait que ces groupes ont ouvert des usines plus modernes, avec des coûts sociaux et salariaux moindres au Maroc (Renault à Tanger) ou en Chine. Chaque pays a, outre la Chine, sa zone privilégiée pour implanter ses usines : maquiladoras au Mexique pour les États-Unis, MittelEuropa (Europe centrale) pour l'Allemagne, Maghreb pour la France, etc.
Ainsi, aujourd'hui, les pays dits industrialisés sont, sauf exceptions (Allemagne), moins industriels que les pays émergents avec entre 10 et 20 % de leur PIB et de leurs emplois qui dépendent de l'industrie contre entre 20 et 35 % ; les Pays les Moins Avancés restent peu industriels, fournissant les matières premières à l'industrie du reste du monde. La nouvelle DIT repose sur le pétrole pas cher qui fait que du bois de chêne produit en France peut être importé en Chine pour être transformé en meubles avant de revenir en France moins cher que s'il avait été transformé en France ; elle exploite également les asymétries de coûts. Or, la raréfaction du pétrole et le développement des Suds qui réduit l'écart de compétitivité avec les pays développés pourraient provoquer une réindustrialisation des Nords. Le phénomène est minoritaire (derrière les skis Rossignol et jouets Smoby), mais la pandémie de Covid et la désorganisation des flux liée, ainsi que les impératifs de souveraineté industrielle pèsent désormais dans la balance.