Retour

Institutions médiévales

🎲 Quiz GRATUIT

📝 Mini-cours GRATUIT

Institutions médiévales

Le nom de féodalité est trompeur. Il nourrit l’illusion de l’uniformité des sociétés médiévales. Chaque aire politique et culturelle a en réalité secrété son propre régime. Celui-ci est monarchique (monarchie élective ou héréditaire, représentative ou non), mais l’empire byzantin, l’empire perse, l’empire carolingien, les califats arabo-musulmans ou l’empire ottoman reposent sur des fondations religieuses et des formes de contrat social divergentes.
Ce qu’on a appelé la féodalité repose sur trois piliers : 

  • le morcellement de l’autorité politique, 
  • l’appropriation de pouvoirs publics
  • et la rémunération de services (notamment militaires) par une dotation foncière (le fief). 

Cette vision, très péjorative, est inapplicable aux zones de conquête, dans le monde arabe aux VIIe-IXe siècles, dans l’Angleterre normande ou en Islande ; elle ne tient pas compte de l’allocation de revenus fiscaux, notamment en Orient et dans le monde arabe ; elle échoue à associer les Églises, les villes et les communes au système politique ; elle ignore la formation d’institutions (Conseils du roi, Parlements, États généraux…) à l’origine de l’État moderne ; elle réduit enfin le complexe à l’uniformité.

 

L'Europe carolingienne

Pépin le Bref, un officier du roi mérovingien, prend les rênes du royaume franc, passe alliance avec le pape de Rome, installe à ses côtés son fils aîné Charles (Charlemagne, « le Grand ») et prépare la conquête des territoires adjacents. À la Noël 800, le couronnement de Charlemagne à Rome consacre la rupture avec l’Empire byzantin et, donc, la séparation d’avec le monde grec. Le nouvel empire, organisé en royaumes dépendants divisés eux-mêmes en quelque 310 comtés, est confié aux membres de la famille de Charles (= Carolingiens) ; le pouvoir de ceux-ci repose sur des règles fermes de primogéniture, d’association de l’aîné au pouvoir impérial et royal. Une alliance avec la papauté romaine justifie la sujétion du haut clergé, séculier et monastique. Une nouvelle réglementation économique et monétaire, applicable dans tout l’Empire, est censée soutenir la production et les échanges : la déforestation et l’extension des cultures – vivrières et arbustives –, incontestables notamment en zone méditerranéenne, la gestion de grands domaines trop sporadiques n’ont pu vaincre les obstacles d’un espace trop étendu, du manque d’hommes et d’une économie guerrière.

Bibliographie de base :

  • Geneviève Bührer-Thierry, L’Europe carolingienne (714-888), Paris, 1999.
  • Pierre Riché, Les Carolingiens. Une famille qui fit l’Europe, Paris, 1983 [plusieurs rééd.].

La féodalité du Moyen Âge occidental

La « féodalité » suffit encore trop souvent à définir le Moyen Âge. Elle constitue un système politique reposant sur l’encadrement de tous les hommes – laïcs et clercs, libres ou serfs, dans l’espace de seigneuries et dans un réseau de fidélités qui s’étend depuis l’empereur ou le roi jusqu’aux serfs. Comme l’empereur et le roi sont entourés de fidèles, chacun des détenteurs d’une parcelle d’autorité publique, appelé « seigneur » (dominus), jusque dans les petites seigneuries dispose d’hommes, des « chevaliers » (guerriers devenus libres) et des serviteurs ou des paysans (libres ou serfs). Le lien qui engage ces hommes repose sur un échange de prestations ratifié par un serment ou un aveu de dépendance. Au niveau des élites guerrières, un seigneur accorde sa protection assortie de la concession d’un bien en « fief » contre un serment de fidélité (d’où le nom tardif de « féodalité ») et un hommage ; au niveau inférieur de la paysannerie et des serviteurs, le seigneur concède un bien à exploiter contre des services en nature ou, plus tard, des rentes. Ce système a modelé les villages autour du château (« enchâtellement »), de l’église et du cimetière (« inecclesiamento »). Or cette forme politique ne se diffuse qu’à partir du Xe siècle depuis le cœur de l’ancien empire carolingien et ne caractérise que les royaumes de l’Europe occidentale et centrale ; elle était ignorée des mondes byzantin et musulman ; seul le Japon des Xe-XIIIe siècles en a connu l’équivalent. 

Bibliographie de base :

  • Florian Mazel, Féodalités (888-1180), Paris, Belin, 2010, 783 p. (Collection : Histoire de France).
  • Michel Lauwers, « De l’incastellamento à l’inecclesiamento. Monachisme et logiques spatiales du féodalisme », Cluny, les moines et la société au premier âge féodal, dir. Dominique Iogna-Prat, Michel Lauwers, Florian Mazel et Isabelle Rosé, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013, p. 315-338.
  • Hélène Débax, « Duby, les juristes et la féodalité », Georges Duby, portrait de l’historien en ses archives, éd. Patrick Boucheron et Jacques Dalarun, Paris, Gallimard, 2015, p.130-136.

La justice en Occident (IXe-XIIIe siècles)

Le droit romain avait réuni en la personne de l’empereur pouvoir militaire (imperium), civil (magistratures) et religieux (grand pontife). Les sociétés médiévales, byzantines et occidentales, ont hérité de cette fusion des pouvoirs et de l’association de la justice à la paix. Les Occidentaux, sous influence du christianisme romain, ont tenté lors de la réforme « grégorienne » du XIe siècle de dissocier droit civil (domaine du profane) et droit ecclésiastique (domaine du sacré). Le résultat le plus sensible apparaît dans l’exercice de la justice selon les personnes : les clercs sont depuis lors soumis à la seule justice ecclésiastique ; les autres personnes sont sous le joug des détenteurs de la justice civile selon la pyramide féodale, depuis le seigneur jusqu’au souverain. La justice découle ainsi du pouvoir public et de ses limites : elle s’exerce dans trois cadres différents, celui des privilèges ecclésiastiques (définis au XIIe siècle dans le Décret de Gratien), celui de la paix privée (la résolution des conflits s’effectue par des arbitrages et des accords entre parties), celui de la paix publique. Les trois champs sont en réalité très imbriqués dans le haut Moyen Âge, comme le démontre l’expérience de la Paix de Dieu (vers 970-1040 environ), mais les juristes de l’Église et ceux des royaumes, s’inspirant de la philosophie antique, ont travaillé à partir du XIIIe siècle à donner la prééminence à la justice officielle, celle de l’État en gestation.

Bibliographie de base :

  • Jean Gaudemet, Église et cité. Histoire du droit canonique, Paris, Ed. du Cerf, 1994.
  • Claude Gauvard, « Grâce et exécution capitale : les deux visages de la justice royale française à la fin du Moyen Âge », Bibliothèque de l'école des chartes 153, 1995, p. 275-290.

Nomad+, Le pass illimité vers la réussite 🔥

NOMAD EDUCATION

L’app unique pour réussir !