Dans l’Éthique à Nicomaque, Aristote propose une définition de la vertu, qui désigne l’excellence de quelque chose, sa capacité à réaliser à la perfection son œuvre propre. Dans le domaine éthique, elle est

« un état habituel qui dirige la décision, consistant en un juste milieu relatif à nous, dont la norme est la règle morale, c’est-à-dire celle-là même que lui donnerait le sage. » (1106 b 36)

La vertu pratique concerne l’action, qui est le résultat d’une décision opérée après délibération : elle consiste à disposer d’une règle pour bien agir, à savoir comment et quand l’utiliser. C’est le sens de ce juste milieu relatif : la vertu consiste à savoir agir de manière mesurée, ni trop ni pas assez, non pas dans l’absolu, mais par rapport à ce que nous sommes et ce qu’exige la situation présente.

La délibération est l’activité de la partie calculatrice de l’âme qui recherche les moyens adaptés pour réaliser une fin qu’on désire. Une fois un moyen trouvé, adéquat et en notre pouvoir, la délibération propose ce moyen au désir, ce qui pousse à l’action. Une action vertueuse, c’est une action où, dans cet enchaînement, la fin est conforme à la règle et le calcul est bon.

La prudence (phronesis) est une vertu intellectuelle, la vertu de cette partie calculatrice de l’intellect qui préside à la délibération (VI, 5) ; elle est distincte de la partie théorique de l’intellect, dont la vertu est la science et a pour objet les affaires humaines et contingentes, et non le nécessaire. La prudence implique l’habileté, faculté d’accomplir les fins qu’on se propose, mais ajoute à l’habileté le fait que cette fin, visée par l’intention, est bonne.

La règle de ce juste milieu est donnée par l’exemple de l’homme prudent, qui sait comment délibérer et évaluer les moyens. Ce qui rend vertueux, ce n’est pas de savoir ce qu’est la sagesse ou la vertu, c’est de prendre exemple sur l’homme vertueux. L’exemple nous fait devenir ce que l’on n’est pas : il fournit un modèle asymptotique, qui permet à ceux qui ne sont pas vertueux d’accomplir des actes vertueux.

Enfin, la vertu est de l’ordre de l’intention : être vertueux, c’est faire les actions vertueuses pour elles-mêmes.

La vertu s’acquiert par l’habitude : c’est en accomplissant des actes semblables à ceux qu’accomplit l’homme vertueux, que nous devenons progressivement plus vertueux.