De la forme d’une loi, Kant déduit une série de contenus des maximes conformes à la loi morale, comme par exemple :

  • des devoirs envers les autres : ne pas mentir, porter assistance aux autres ;
  • des devoirs envers soi-même : développer ses facultés, ne pas se suicider.

Comme Kant le remarque dans la Doctrine de la vertu, les devoirs envers soi-même sont premiers et fondent les devoirs envers les autres : s’il n’y avait pas de devoirs de l’homme envers lui-même, il n’existerait alors absolument aucun devoir, pas même des devoirs extérieurs. Car :

« je ne puis me reconnaître comme obligé envers d’autres que dans la mesure où je m’oblige en même temps moi-même » (Doctrine de la vertu).

C’est que « la loi en vertu de laquelle je me considère comme obligé, émane dans tous les cas de ma propre raison pratique ». Il faut se respecter comme personne raisonnable et respecter l’humanité en soi pour pouvoir penser un devoir envers autrui.

Cette notion de devoir envers soi-même a été critiquée par des philosophes contemporains (Ruwen Ogien, Matthiew Singer) à la fois comme étant contradictoire (on ne peut avoir de devoir qu’envers quelqu’un d’autre, car la notion de devoir implique de respecter un engagement) et comme étant porteuse d’une morale maximaliste. On s’est alors souvent appuyé sur l’argumentation de Mill :

La seule raison légitime que puisse avoir une communauté pour user de la force contre un de ses membres est de l’empêcher de nuire aux autres. Contraindre quiconque pour son propre bien, physique ou moral, ne constitue pas une justification suffisante. Un homme ne peut pas être légitimement contraint d’agir ou de s’abstenir sous prétexte que ce serait meilleur pour lui ; que cela le rendrait plus heureux ou que, dans l’opinion des autres, agir ainsi serait sage ou même juste. Ce sont certes de bonnes raisons pour lui faire des remontrances, le raisonner, le persuader ou le supplier, mais non pour le contraindre ou lui causer du tort s’il agit autrement. La contrainte ne se justifie que lorsque la conduite dont on désire détourner cet homme risque de nuire à quelqu’un d’autre. Le seul aspect de la conduite d’un individu qui soit du ressort de la société est celui qui concerne les autres. Mais pour ce qui ne concerne que lui, son indépendance est, de droit, absolue. Sur lui-même, sur son corps et son esprit, l’individu est souverain.

Mill propose ainsi une conception négative de liberté comme indépendance – on peut faire ce que l’on désire tant qu’on ne nuit pas aux autres – qui n’est pas définie dans son contenu. On peut conseiller, raisonner quelqu’un sur la manière de se conduire, mais on ne peut pas l’obliger.