Hobbes ancre sa philosophie dans une anthropologie rationnelle, un discours cohérent et analytique sur l’homme. La philosophie du commun est appréhendée à partir de ses composants : l’homme individuel.
L’anthropologie de Hobbes est matérialiste. L’homme est défini par ses passions, qui sont des réactions aux sollicitations de nos sensations.
Pour Hobbes, toute pensée prend son origine dans la sensation, même si elle ne s’y résume pas. La sensation fondamentale est le toucher : la passion se comprend comme réaction à la pression exercée sur le corps par des objets extérieurs.
L’imagination désigne un « obscurcissement » du mouvement de la sensation ; la pensée est l’enchaînement des différentes images conservées en l’esprit. Cet enchaînement est ou bien désordonné, ou bien naturellement ordonné (association d’idées) en fonction d’un désir précis ; mais par le secours de « la parole et de la méthode », l’homme peut améliorer ses facultés et construire un véritable ordre.
Le langage est le fondement de la politique, ce qui permet non seulement de perfectionner la connaissance, mais aussi de produire un monde commun. Hobbes en distingue quatre fonctions (Léviathan, I, ch. 4) :
- une fonction d’enregistrement : le langage peut « fixer l’enchaînement de nos pensées » qui sinon s’évanouissent, ce qui permet d’acquérir des arts et des sciences ;
- une fonction de communication : par le langage, l’on peut « montrer aux autres le savoir que nous avons atteint, ce qui consiste à se prodiguer des conseils et des enseignements les uns aux autres » ;
- une fonction d’expression : il s’agit de partager ses volontés et ses dessins aux autres ;
- une fonction poétique : procurer du plaisir aux autres par des jeux de mots.
À ces quatre fonctions, répondent quatre abus :
- l’inconstance des mots peut biaiser la formation des pensées (on se trompe soi-même) ;
- l’usage métaphorique des mots peut tromper les autres ;
- le mensonge, qui repose sur le décalage entre le discours et l’intention ;
- l’offense, quand le langage est utilisé pour blesser les autres.
Sans le langage, il n’y aurait pas de contrat, pas de république ; mais le langage ouvre la porte à l’ambiguïté et à la tromperie, et donc aux conflits politiques. Il importe donc de réguler l’emploi des mots pour pacifier la communauté politique.