L’efficacité des lois naturelles ne vient pas de la puissance de la raison : elles ne suffisent pas à lutter contre la force de l’amour-propre et le désir de puissance. Les lois naturelles doivent être assurées par un pouvoir fort, celui du souverain.
Les lois sont un commandement, qui suppose un support, une volonté réelle qui les effectue et se distingue de la volonté des citoyens, celle d’un souverain. Ce qui guide un État n’est pas la volonté du support, mais celle de l’État qu’il représente. On pourra s’y reconnaître et s’en approprier les actes et les décisions. La divergence des volontés particulières mène à une autodestruction. La solution se situe dans l’élaboration d'une volonté unique, dans laquelle chaque volonté sera représentée.
La notion de représentation est empruntée au domaine théâtral et judiciaire dans lequel on peut dissocier l’acteur et l’auteur. L’acteur incarne un auteur qui est absent. Il faut distinguer :
- l’auteur, qui autorise (qui écrit la pièce) ;
- l’acteur, qui représente ;
- le représenté (le personnage que figure l’acteur).
Dans le domaine politique, la difficulté est qu’un Souverain unique doit représenter une pluralité de volontés : comment une pluralité de représentés peut-elle se penser comme auteurs des actes d’un seul acteur ?
Il faut donc distinguer deux formes de représentation :
- un cas où l’auteur est le représenté, comme dans la délégation : un avocat représente son client, qui à la fois l’autorise et est substitué par lui ;
- un cas où il faut distinguer l’auteur du représenté, comme dans le cas de la représentation d’une personne fictive.
C’est sur ce dernier modèle que Hobbes pense la représentation politique. Le peuple est une fiction, dont l’unité est produite de façon rétroactive. Les différentes volontés autorisent, le souverain est l’acteur qui représente, et le représenté c’est le peuple, l’unité de ces différentes volontés produites par le contrat. La représentation politique ne peut pas être du type d’une délégation : le peuple existerait avant d’être représenté, comme si la solution était déjà là. Or, la multitude ne se convertit en une unité, en un peuple, que par le contrat.
Pour Hobbes, il n’y a pas un seul contrat, mais une multitude de pactes entre individus, par lesquels chacun abandonne son droit à user de sa puissance comme il le désire. Mais le souverain ne contracte pas, il est un tiers que chacun autorise et dont chacun reconnaît ses actes comme les siens. Celui qui contracte est l’auteur des actes du tiers qui le représente : il est tenu d’en être aussi responsable. Le souverain est extérieur au contrat, mais en est le bénéficiaire, il représente de manière distributive (chacun) et collective (tous).