Le problème de la connaissance n’est pas le seul qui implique un passage des réalités sensibles aux réalités intelligibles. L’hypothèse des formes intelligibles permet à Platon de résoudre d’autres difficultés : éthiques, politiques...

Le passage du sensible à l’intelligible peut également se faire par l’idée de beau.

Comme le montre le Phèdre, la beauté a une « prérogative » : l’idée de beau est celle qui resplendit le plus dans le sensible, plus que les idées de justice, de sagesse ou de beauté (250d). Ce privilège tient à :

  • l’intensité de l'expérience de la beauté. Avant son incarnation sensible, l’âme a contemplé les réalités intelligibles et a été frappée de leurs beautés maximales. Dans le sensible, la beauté provoque l’amour, un sentiment ambivalent où l’âme s’éveille sans comprendre ce qui lui arrive ;
  • à la mobilisation du sens de la vision. La beauté se donne à voir par son « éclat » et suscite le désir, désir qui ne peut être finalement satisfait que par la contemplation des réalités intelligibles.

Le problème de cet itinéraire par le beau est que son point de départ n’invite pas à l’activité de la pensée : l’amour d’un beau corps tend à captiver le désir et à l'enfermer dans le sensible. C'est pourquoi le discours de Diotime, dans le Banquet, souligne l’importance d’une initiation, analogue à celle connue dans les mystères grecs, et qui soit menée par un « guide » (210a).

Cette initiation comprend les étapes suivantes :

  • le point de départ est l’amour d’un « unique beau corps » : c’est encore le moment du désir physique ;
  • mais le guide doit montrer que tous les beaux corps ont quelque chose en commun : la beauté ;
  • puis, il faut remarquer que la beauté n'est pas simplement de l’ordre du physique, mais concerne aussi les qualités morales, voire les connaissances ;
  • la fréquentation de ces réalités intelligibles doit conduire à la contemplation d’une réalité au-delà de laquelle on ne peut remonter : l’Idée de beau.

Cette beauté idéale est une, éternelle, identique à elle-même, mais c’est d’elle que les différentes réalités tiennent une qualité commune, la beauté. La relation entre l’idée de Beau et les belles réalités est nommée par Platon « participation (metexis) ».