La providence suppose l’idée d’un sens de l’histoire (fin et signification) et d’une logique, d’un lien nécessaire entre les événements. Cela signifie que l’on peut expliquer l’avènement des événements historiques : une rationalité est à l’œuvre de l’histoire, on peut en faire une analyse philosophique et rationnelle. L’histoire n’est pas le règne du hasard, d’un chaos inexplicable.
La notion de providence connote également l’idée de perfection. D’où une difficulté essentielle à toute explication providentialiste : comment rendre compte du mal, des violences qui parsèment l’histoire si l’histoire tend à une amélioration continue ?
Dans la Science nouvelle, Vico propose une nouvelle science, fondée sur l’étude de la logique immanente à l’histoire. Cela implique :
- Que l’histoire soit régie par une providence, qui fonctionne comme une ruse : elle se sert des mauvais appétits de l’homme, concentré sur son amour-propre, pour en tirer un monde civil. L’action de la providence est celle d’un renversement du mal en bien. L’histoire suit ainsi une progression continue, qui consiste dans un processus graduel de civilisation et de socialisation, et ce jusqu’à la fin de l’histoire : lorsque, dans les cités, sous la pression du luxe et d’un raisonnement trop raffiné, la société dégénère en « barbarie de la réflexion ». Le ricorso, le retour aux temps primitifs, même si c’est sous une nouvelle forme, montre qu’il s’agit toujours, pour la Providence, de retourner le mal en bien. La conception providentialiste est ici cyclique.
- Que la providence agisse par finalité et non de manière aveugle (contre les épicuriens, mais aussi les stoïciens). Par ailleurs, elle agit à l’insu de la conscience des hommes.
- Que l’esprit humain soit capable, au présent, de « recréer en idée » l’histoire de l’humanité. Nous pouvons comprendre l’histoire, c’est-à-dire en dégager le sens dans la mesure où :
- il y a une homogénéité entre le sujet et son objet (c’est l’esprit humain qui connaît l’esprit humain). Contrairement aux sciences de la nature, les sciences historiques mettent l’homme face à un ordre qu’il a créé. Il peut mieux le comprendre, même si la mémoire défaillante fait qu’il ne peut avoir une connaissance que conjecturale de l’histoire, qui en dégage la logique « idéale » ;
- la logique de l’histoire est éternelle et uniforme car elle est commune à plusieurs peuples. On peut comparer des peuples qui n’ont aucun lien géographique et historique, et pourtant la constitution d’une nation possède des points semblables. Ce fondement commun, Vico le nomme sens commun, qui est une manière spontanée de se conduire, « sans aucune réflexion » ;
- il y a une continuité entre le temps présent et le passé, continuité qui se voit notamment dans l’étymologie du langage.
Pour Vico, cette logique doit repartir des origines :
« La nature des choses n’est rien d’autre que leur naissance en certains temps et de certaines manières ».
Cette origine n’est pas imaginée, mais reconstruite rationnellement.