Selon Spinoza, la pensée et l’étendue sont les deux attributs par lesquels nous pouvons connaître Dieu. Ces deux attributs sont deux aspects de cette substance mais sont identiques en Dieu.
Ces deux attributs ont quelque chose d’irréductible : chacun s’explique par ses propres lois (Éthique, III, 2) :
- les idées s’expliquent par les idées et non par autre chose (association d’idées) ;
- les corps s’expliquent par des relations entre des corps.
Aucune relation causale n’est selon Spinoza envisageable entre le corps et l’esprit (contre Descartes) et il y a de nombreux exemples d’expériences où le corps, par son automatisme, dépasse ce que l’esprit peut envisager : ivresse, somnambulisme...
Pourtant, l’expérience témoigne que ce qui est ressenti par le corps l’est aussi par l’esprit. Comment le comprendre ?
Il existe, selon Spinoza, un strict parallélisme, un rapport d’identité entre l’enchaînement des idées et l’enchaînement de leurs objets (qui sont corporels). Ce parallélisme est fondé sur l’identité des attributs en Dieu : en tant que pensée, celui-ci est cause des différentes pensées ; en tant qu’étendue, il est cause des spécificités des différents corps.
Selon Spinoza, l’esprit est l’« idée du corps » : au sens où il pense le corps, qui est son objet et ce qui l’affecte, il en est l'idée, sans penser au corps de manière active (il n’en a pas toujours l’idée) :
« l’objet de l’idée constituant l’esprit humain est le corps, c’est-à-dire un certain mode de l’Étendue existant en acte ».
Ce qui implique :
- Que ce que nous percevons des corps extérieurs indique tout autant la nature de notre corps, ce qu’il est capable de faire ou non que la nature même de ces corps (Éth. II, 16) ;
- L’esprit peut imaginer son corps propre, mais uniquement s’il est affecté par une image qui le renvoie à lui-même ;
- La puissance de l’esprit n’est pas désunie de la puissance du corps. Au contraire, plus un corps peut être affecté et affecter, plus l’esprit pourra penser :
plus le corps est capable, par rapport aux autres, d’accomplir ou de subir un grand nombre d’actions, plus l’esprit de ce corps est, par rapport aux autres, capable de percevoir simultanément un plus grand nombre d’objets ; et plus les actions d’un seul corps dépendent de lui seul, moins les autres corps concourent à l’action du premier, plus l’esprit de ce corps est capable de comprendre distinctement. (II, 13)
L’éthique de Spinoza ne disjoint pas le corps et l’esprit : le salut de l’un passe par le salut de l’autre et une diversité maximale d’affections et d’expériences.