Selon Spinoza, l’homme est défini par son conatus, sa puissance d’agir, qui désigne :

  1. Une force d’opposition par laquelle on peut résister aux choses extérieures qui tendent à la supprimer ;
  2. Un effort de conservation de soi : il exprime la puissance infinie de Dieu, mais sous l’aspect limité des modes qui rencontrent d’autres réalités finies.

La joie et la tristesse désignent les deux pôles affectifs fondamentaux qui traduisent l’augmentation de la puissance d’agir (joie) ou sa diminution (tristesse). 

Il faut donc remarquer :

  • que le désir n’est pas un manque, mais que le manque est une modalité du désir (lorsqu’il est triste, c’est-à-dire lorsque l’existence de la chose conçue est exclue) ;
  • que le désir, qui chercher à augmenter sa puissance, tend vers la joie.

Spinoza dégage plusieurs propriétés des affects :

  1. Si l’âme a été affectée de deux choses en même temps et si elle est, par la suite, affectée de l’une, elle sera affectée de l’autre (III, 14) : cette proposition explique que l’on puisse associer à des choses des affects qu’elles ne causent pas immédiatement (III, 15) ;
  2. Si nous imaginons qu’une chose possède de la ressemblance avec une autre, nous serons affectés par elle par le même affect que celui suscité par l’autre (III, 16) : cela explique que, lorsque nous sommes affectés par une chose qui suscite de la joie, mais qu’on imagine avoir une ressemblance avec une chose qui suscite de la tristesse, nous l’aimons et la haïssons à la fois, ce que Spinoza appelle « flottement de l’âme » (III, 17) ;
  3. Nous imitons les affects d’autrui, car nous l’imaginons comme semblable à nous, ce qui peut donner lieu à la pitié (imitation de sa tristesse) comme à l’émulation (imitation de son désir) : III, 27 ;
  4. L’âme s’efforce d’imaginer ce qui pose sa puissance d’agir (III, 54), de promouvoir ce qui suscite la joie et d’écarter ce qui suscite la tristesse (III, 28) ;
  5. Imaginer que l’on peut c’est pouvoir davantage, alors qu’imaginer que l’on ne peut pas nous rend triste et baisse notre puissance d’agir (III, 55).