La perspective de Nietzsche envers l'art est multiple.
On peut d'abord distinguer une critique d'une conception de l'art comme :
- attitude désintéressée et purement contemplative (contre Kant et Schopenhauer) : pour Nietzsche, l'art est « promesse de bonheur » (Stendhal), il a à voir avec le plaisir, l'affect, le corps (Généalogie de la morale, III, 6) ;
- production du génie ou de l'inspiration surnaturelle : l'art est le fruit d'un travail de sélection, de maturation (Humain trop humain, I, §155). Le don est
une somme antérieure d’étude, d’expérience, d’exercice, d’appropriation, d’assimilation, soit à l’époque de nos pères, soit plus anciennement encore. (Aurore, §540)
Nietzsche pose ensuite la question de la valeur de l'art pour la vie. De manière générale, Nietzsche voit dans l'art
- une discipline qui, par l'assimilation de contraintes rigoureuses, en devient créatrice : « ce que l’on appelle "invention" (sur le domaine métrique par exemple) est toujours une de ces entraves que l’on se met à soi-même" (Humain trop humain, II, § 140) ;
- une bonne disposition envers l'apparence, qui nous guérit d'un désir trop prononcé pour la vérité (Gai Savoir, §107), qui peut être insupportable. L'art transforme l'existence en phénomène esthétique en glorifiant l'apparence, il est un « culte de l'erreur » :
- en ce sens, l'art assume la dimension créatrice des interprétations humaines et les développe.
Reste qu'il y a, selon Nietzsche, plusieurs types d'art, et que cette tendance à l'idéalisation de l'apparence peut révéler ou bien un dégoût devant le monde tel qu'il est (Nietzsche vise ici le romantisme) ou bien une volonté de sublimer et d'accepter cette apparence (Gai Savoir, § 370).