L’image traditionnelle, passéiste, de la philosophie se trouve renforcée par une vision historique du développement de la pensée éducative à travers trois étapes :

1.
L’étape de la réflexion philosophique, avec spéculations sur l’enfant (l’infansi) court depuis la plus lointaine Antiquité jusqu’au Siècle des Lumières. Ces penseurs ont élaboré des théories de l’éducation, réfléchi sur les enjeux de la connaissance, du savoir, mais pour l’essentiel, ils sont restés au niveau de la pensée spéculative. Ce sont Platon et Aristote pour l’Antiquité, Montaigne et Kant, Rousseau, Diderot pour le XVIIIe siècle.
L’éducation est alors un objet de réflexion philosophique à l’intérieur de la philosophie et non un objet externe qui donnerait lieu à une réflexion philosophique spécifique. Elle est alors pensée comme l’un des accomplissements de la réflexion sur l’homme. La philosophie est inévitablement une philosophie de l’éducation puisque philosopher c’est questionner le rapport de l’homme au savoir, prendre la mesure des dimensions éthique et politique de l’existence humaine, penser l’être humain comme perfectible, ayant à devenir humain, bref comme éducable.
2. La deuxième étape est le moment du pédagogique, avec des praticiens : les pédagogues. Ce rapport dominant à l’éducation court sur plus d’un siècle, soit des années 1850 aux années 1960-1980. Ces praticiens se réfèrent à la pensée philosophique, et à la psychologie à travers ce qu’elle dit du développement de l’enfant et des apprentissages.
3. La troisième étape, celle d’aujourd’hui, s’inscrit dans le cadre de l’idéologie dominante à caractère scientifique et technique. Elle s’appuie sur les sciences humaines, dont en particulier les sciences de l’éducation. On parle aussi aujourd’hui volontiers d’ingénierie pédagogique à travers le développement des sciences de l’éducation, des théories de l’apprentissage, des techniques de formation et de management.

Que la philosophie de l’éducation ait une longue et riche histoire n’empêche pas qu’elle soit toujours vivante :

  • soit comme dimension de la réflexion philosophique,
  • soit comme réflexion sur le sens des pratiques éducatives.


S’appuyer sur une vision du passé permet de se donner davantage de moyens, d’éléments pour penser le présent, pour anticiper sur l’avenir.

C’est Bergson, un philosophe du début du XXe siècle, qui, parlant de la mémoire, montre qu’elle n’est pas seulement la faculté de se souvenir, elle est plus que cela : une dimension de la conscience que tout individu a d'exister. Cet enjeu de mémoire est essentiel pour quelqu’un qui, en voulant devenir enseignant, devient à la fois un héritier et un transmetteur d’héritage, un passeur.