La question de la prise en compte des valeurs au sein de l’institution scolaire est posée avec force. Former le citoyen, éduquer à des comportements écologiquement responsables, promouvoir l’égalité entre filles et garçons, etc. ce sont ces missions que l’école est sommée d’assumer.

Se pencher sur la question de la norme scolaire s’apparente aujourd’hui à une gageure. Cette question fait l’objet d’une intense activité de construction politique et médiatique qui la constitue en un problème social majeur, à travers les figures multiples et souvent confondues des « incivilités », de la crise de l’autorité ou, plus encore, de la violence.

Il existe aujourd’hui un très large consensus sur la nécessité pour l’école de transmettre les « valeurs de la République ». Dans l’histoire du système éducatif, ce consensus est souvent né d’une inquiétude concernant l’ordre social. Ainsi, l’éducation civique est-elle relancée en 1985 par J-P. Chevènement, alors ministre de l’Éducation nationale. Lors du tournant sécuritaire de la gauche en 1997, il se prononce également pour le « rétablissement d’une saine hiérarchie des valeurs » (Brier, 1997, p. 112) et fait adopter en conseil des ministres, le 26 novembre 1997, un « Plan pour l’éducation civique dans l’enseignement scolaire ». C’est ainsi qu'au lendemain des attentats des 7 et 9 janvier 2015, la ministre de l'Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, lance la « grande mobilisation pour les valeurs de la République ». Parmi les 11 mesures annoncées, la première demande de « renforcer la transmission des valeurs de la République », la seconde de « rétablir l'autorité des maîtres et les rites républicains ».

Si la classe est un environnement social, c’est aussi parce qu’y sont véhiculées des normes et des valeurs dont l’enseignant est souvent le vecteur.  
Au sein de l’école, l’accent mis sur la transmission des valeurs, l’instauration de nouveaux dispositifs pédagogiques s’inscrivent dans une évolution plus large des pratiques pédagogiques. La norme qui tend à s’imposer est celle du professeur qui pratique le « côte à côte » avec les élèves plutôt que le « transmissif descendant » où l’enseignant « assène des vérités ».

La mission dévolue à l’école de transmettre des valeurs soulève ainsi de nombreuses difficultés. Sous la devise républicaine, se cachent diverses options normatives. Se pose alors la question de savoir quelle est la légitimité de l’école à transmettre l’une d’entre elles.