Sigmund Freud aborde la question des groupes sociaux dans plusieurs de ses textes. Les développements ultérieurs de ce type de recherches verront le jour après la Seconde Guerre mondiale.
Selon Wilfred R. Bion, Recherches sur les petits groupes, Paris, Puf, 2002, l’appartenance d’un individu à un groupe déforme les modalités de son expression personnelle. Ainsi, l’expression individuelle devient l’affaire du groupe. Le paradoxe réside dans la croyance tenace que chaque membre, quand il parle, le fait en son nom propre, alors que c’est surtout au nom du groupe qu’il s’exprime.
La conséquence de ce phénomène, qui concerne chacun à son insu, implique :
- la difficulté du groupe à accepter les différences personnelles entre ses membres ;
- la propension pour chaque membre à ressentir ces différences comme une menace potentielle contre sa propre intégrité.
Chaque groupe serait ainsi régi par une « mentalité » propre. Cette mentalité du groupe correspond à l’ensemble des représentations peu ou pas conscientes qui s’imposent à ses participants, comme autant de règles à respecter pour en être un membre légitime. Le modèle de fonctionnement du groupe, ressenti comme volonté unanime, est la première source de souffrance individuelle, du fait qu’il entre en conflit avec les désirs personnels de chacun. Une autre source de tension réside dans l’harmonisation difficile entre la vie affective du groupe (émotions et sentiments) et sa capacité de discernement (prises de conscience, réflexion).
« Le nous est une résistance du sujet », affirmait Jacques Lacan. Les recherches des psychanalystes français confirment et complètent cette proposition. Didier Anzieu admet qu’il existe deux modèles de référence pour l’étude de la dynamique des groupes : celui de Kurt Lewin et celui issu de la psychanalyse. Née dans les années 1960-1970, la recherche psychanalytique française sur les groupes pose l’existence d’une « illusion groupale » : tout groupe se réfère, à son insu, à une illusion, une croyance, un mythe qui fonde sa cohésion apparente.