La réplication de l’ADN consiste à produire une copie de l’ADN existant. Cette réaction est réalisée en amont de la division cellulaire : la cellule va former deux cellules-filles, chacune possédant une copie du pool d’ADN de la cellule-mère.
Modélisation
Les travaux de Meselson et Stahl (utilisation d’azote lourd) ont montré que la réplication est semi-conservative : les deux brins d’ADN sont séparés et chacun des brins sert de matrice à la synthèse d’un nouveau brin. À la fin, les deux molécules d’ADN produites sont constituées chacune d’un brin ancien et d’un brin nouveau.
Les travaux de Cairns ont confirmé les travaux précédents : il a observé, chez E. coli, le déroulement de la réplication du chromosome bactérien. Pour cela, il a fourni de la thymine marquée, puis a figé les cellules à différents temps. Après révélation par autoradiographie, il a observé que le chromosome bactérien se séparait progressivement en deux molécules et que chacune d’elle servait de matrice à la synthèse d’un nouveau brin.
Les travaux de Cairns ont montré une zone de séparation des deux brins d’ADN à répliquer : l’œil de réplication. Cette zone s’agrandit au cours du temps, jusqu’à séparer les deux brins. Cette zone s’agrandit vers la droite et la gauche : la réplication est bidirectionnelle.
Les acteurs de la réplication
Ils sont fondamentalement les mêmes chez les Procaryotes (ProK) et les Eucaryotes (EuK), seules les structures changent ou le nombre d’intervenants :
Brin d’ADN : le brin d’ADN orienté 3′→5′ sert de matrice ;
ADNpolymérase : elle synthétise le nouveau brin d’ADN en utilisant l’un des anciens brins comme matrice. Elle respecte le principe de complémentarité des bases. Il en existe trois modèles chez les ProK (ADNpol I, II et III) et douze chez les EuK. Elle nécessite une zone double-brin sur le brin à répliquer (amorce d’ARN), et ajoute des nucléotides triphosphates libres, dans le sens 5′→3′= elle fixe le 5′−phosphate d’un nucléotide libre sur le 3′−OH d’un nucléotide déjà en place. La libération de pyrophosphate (PP) libère l’énergie nécessaire à cette liaison ester-phosphorique ;
Désoxyribonucléotides (dnt) libres : dATP,dGTP,dTTP et dCTP sont les briques de la nouvelle molécule. Lors de leur incorporation, ils perdent deux phosphate (=pyrophosphate), ce qui est très énergétique ;
Hélicase : enzyme hexamèrique qui sépare les deux brins d’ADN à répliquer. Elle se place à la fourche de réplication et se fixe sur l’un des brins : elle hydrolyse de l’ATP pour pouvoir séparer les deux brins au cours de la progression de l’ADNpolymérase ;
Primase : enzyme qui met en place l’amorce d’ARN sur le brin matrice, afin que l’ADNpolymérase puisse s’installer. Elle reconnait les yeux de réplication et synthétise de petits ARN (15−30 nt)= cela forme localement un hétéroduplex ADN−ARN. Il sera éliminé ultérieurement et remplacé par de l’ADN ;
Topoisomérase : enzyme placée au niveau de la fourche qui permet le débobinage de la molécule d’ADN à répliquer, en consommant de l’ATP. Faites l’expérience chez vous : essayer de séparer en deux un ruban de papier, très enroulé (type ruban de cadeau). Les deux rubans vont se pelotonner et bloquer la séparation. La topoisomérase permet de couper temporairement un des brins, de le faire tourner librement autour de l’autre pour limiter la formation de la pelote. Elle ressoude ensuite le brin.
Protéines stabilisatrices (SSB= single-strand binding proteins) : enzymes qui se placent entre la fourche et l’ADNpolymérase pour stabiliser la section de brin matrice encore simple brin.
Déroulement de la réplication chez les Procaryotes (voir figure)
Initiation : ouverture du chromosome bactérien au niveau d’une séquence bien définie (oriC). Mise en place de l’hélicase qui sépare les deux brins et des SSB qui empêche leur réunion ;
Elongation : mise en place des amorces d’ARN par la primase. Installation de l’ADNpolymérase qui synthétise alors deux types de brins :
- Brin direct (précoce) : brin synthétisé à partir du brin matrice 3′→5′. Il s’agit d’une synthèse continue, comme présentée précédemment ;
- Brin retardé (tardif) : multiples petits brins (fragments d’Okazaki), synthétisés sur le brin matrice orienté 5′→3′. A la fin de l’élongation les brins seront réunis entre eux grâce à une ADNligase, pour former un brin continu.
Dans chaque œil de réplication, on trouve 4 ADNpolymérases : deux par fourche = une pour le brin direct et une pour le brin retardé de chaque côté de l’œil.
Une RNase H va éliminer le brin d’ARN ayant servi d’amorce et il sera remplacé par un brin d’ADN équivalent.
Terminaison : mécanisme mal-connu, impliquant un complexe de terminaison (non-élucidé).
Déroulement de la réplication chez les Eucaryotes
Le déroulement de la réplication est sensiblement le même. Quelques différences sont notables :
- La réplication n’a lieu que durant la phase S du cycle cellulaire chez les EuK, alors qu’elle dure quasiment tout le cycle chez les ProK ;
- L’ADN des Euk étant beaucoup plus long, il existe plusieurs sites d’initiation et donc de très nombreux yeux de réplication (1 pour 100 000 nt). Il est unique chez les ProK. Les multiples yeux se rejoignent et séparent la molécule-mère en deux molécules-filles ;
- Au fur et à mesure de la synthèse des nouveaux brins d’ADN, les histones se mettent en place pour former la chromatine.
Vérification de la réplication
Au cours de la réplication, il peut y avoir des erreurs. Elles sont liées au comportement des base qui peuvent former des tautomères (voir figure). La thymine, guanine et adénine peuvent s’apparier différemment :
- Le tautomère de thymine peut s’apparier avec la guanine ;
- Le tautomère de guanine peut s’apparier avec la thymine ;
- Le tautomère de l’adénine peut s’apparier avec la cytosine.
Ce mésappariement va introduire des changements ponctuels dans la séquence, ce qui peut modifier le sens de l’information génétique (mutation). Il existe des mécanismes de correction : chez les ProK, l’ADNpolymérase I se place à l’extrémité 3′ du brin néoformé. Elle possède :
- Une activité exonucléasique 3′→5′, qui remonte la séquence et élimine les mésappariements ;
- Une activité polymérase 5′→3′ qui remplace les mésappariements éliminés.