Les allomorphes sont les équivalents morphologiques des allophones en phonologie. Tout comme ces derniers, les allomorphes peuvent avoir différentes réalisations tout en gardant leur signification. On peut aussi parler plus simplement de variantes d’un même morphème. Comme en phonologie, on distingue deux sortes de variantes : les variantes libres, qui sont indépendantes du contexte du morphème, et les variantes combinatoires, qui sont entraînées par un élément du contexte d’apparition du morphème.

  • Les variantes libres des morphèmes

Certains morphèmes peuvent présenter des variations en dehors de toute nécessité contextuelle. Par exemple, on dit je peux, mais on peut aussi dire indifféremment je puis. Seule l’inversion du pronom clitique entraîne obligatoirement l’allomorphe [pyi] : ainsi, on dira que puis-je faire ? et non pas *que peux-je faire ?

De la même façon, le verbe s’asseoir connaît deux radicaux différents :

  • je m’assieds [ʒə masje]
  • je m’assois [ʒə maswa]
  • nous nous asseyons [nu nuz asεjƆ]
  • nous nous assoyons [nu nuz aswajƆ]

Généralement, ces variantes libres sont entraînées par des raisons non proprement linguistiques, mais régionales ou sociales : je puis correspond à un usage soigné, je peux à un usage courant.

  • Les variantes combinatoires des morphèmes

Les variantes combinatoires des morphèmes sont liées au contexte phonologique qui les entoure. Un grand nombre de morphèmes, qui ont une forme unique à l’écrit, se présentent sous différentes formes à l’oral. L’exemple du pluriel anglais est significatif de ces variations. Il reçoit trois marques principales différentes : tantôt [s], tantôt [z], et tantôt [iz], à quoi elles ajoutent une marque moins importante [Ən] (child est un mot irrégulier. Son pluriel children utilise une marque /an/ au lieu de /-iz/, /-s/ et /-z/)... Le signifié de « pluralité » est ainsi associé à quatre signifiants différents.

Par exemple :

/-iz/ ne se trouve qu’après /s z ∫ dʒ t∫/, soit après les consonnes sifflantes ou chuintantes.

/-s/ ne se trouve qu’après /p t k f θ/, soit après les autres consonnes sourdes.

/-z/ se trouve après les autres consonnes, soit les sonores, et toutes les voyelles.