Les humanités numériques peuvent tout d’abord se présenter telles des sciences historiques. Les disciplines historiques n’hésitent en effet guère à recourir aux outils numériques, en particulier aux bases de données. Plus récemment, de nouvelles perspectives s’y développent, grâce à l’analyse de réseaux, à leur visualisation, mais aussi à l’analyse de texte (text mining) et à la fouille de données (data mining), qui permettent d’approcher les sources dans leur globalité par une distant reading ou lecture distanciée, souvent avec l’aide de procédés de visualisation (et/ou représentation graphique de données statistiques). En outre, au croisement de la public history et des humanités numériques, on trouve de nombreux projets dits de valorisation (ou vulgarisation dans un sens noble), utilisant des outils numériques et à destination d’un large public.

Les humanités numériques donnent par ailleurs une place de choix à la linguistique. Précoces dans l’appropriation des technologies numériques, les linguistes ne s’arrêtent pas au text mining (fouille de textes), mais exploitent également leurs corpus textuels avec les outils de lexicométrie, textométrie ou logométrie ainsi que de topic modelling (modélisation des thèmes), de l’attribution automatique des textes (hypothèses sur les auteurs) et de l’analyse de réseaux d’occurrences dans la littérature. Des logiciels très perfectionnés et accessibles pour les chercheurs en sciences humaines et sociales, comme Hyperbase, IRaMuTeQ, Lexico ou TXM, permettent de décrire et de modéliser les textes en alliant approche qualitative (moteur de recherche, concordanciers, navigation hypertextuelle) et approche quantitative (statistique textuelle, index fréquentiel, calcul des cooccurrences, réseaux, analyse factorielle des correspondances, etc.).

Les humanités numériques en littérature prennent également en compte le nouveau régime des textes dans l’environnement numérique et plus précisément en ce qui concerne les activités de lecture et d’écriture sur écran. De nouveaux supports et modes d’écriture apparaissent, tels que les blogs et les systèmes d’écriture collaborative qui transforment l’écrit dans sa forme et son contenu. Wikipédia est un exemple significatif de ces nouveaux processus d’écriture. La culture numérique dans les humanités fait sortir les textes du livre, pour les insérer dans une histoire de la lecture que la culture occidentale a toujours connue.

La sociologie est également concernée. Dès les années 1970, la sociologie s’est intéressée à l’informatisation (du travail, du domicile) et aux nouvelles technologies de communication (Minitel, Internet, messagerie électronique). Au début des années 2000, la sociologie est, globalement, prise de court par le surgissement des réseaux numériques et du Web en particulier, obligeant à prendre en compte une nouvelle catégorie générique d’acteurs, à savoir les internautes. Dans le domaine des sciences, technologies et société, les recherches portent aussi sur la conception et la mise en œuvre des technologies numériques, y compris l’étude sociale des logiciels et protocoles informatiques.

La notion d’humanités numériques ne s'impose toutefois pas facilement dans les sciences sociales, du moins dans un premier temps, puisque pour établir la scientificité de leurs disciplines, la plupart des sociologues ont cherché à rompre avec la tradition herméneutique des sciences humaines et sociales, parfois au profit d’une conception autonome du social. Depuis, la sociologie s’est intéressée à de multiples aspects des mondes numériques, tant du point de vue des usages des TIC que des outils d’analyse des réseaux (branche de la sociologie depuis les années 1930. La scientométrie a intégré l’analyse des réseaux sociaux et sémantiques en science depuis les années 1980, puis la webométrie dans les années 2000. La sociologie des sciences étudie aussi les transformations en cours dans les sciences humaines et les institutions culturelles liées à l’utilisation des technologies numériques. La sociologie du numérique s’attache également à étudier l’impact potentiel du big data sur les méthodes en sciences sociales.