La politisation implique de déterminer les critères permettant de considérer qu’un individu ou un public est « politisé ». Cela amène à la problématique plus globale de la définition de la politique pour distinguer ce qui en relève et ce qui n’en relève pas. De manière simplifiée, on peut considérer qu’est politique toute activité en lien avec l’exercice du pouvoir politique ou la compétition visant à conquérir ce pouvoir (en particulier l’élection). C’est pourquoi les historiens ont étudié la politisation comme diffusion réussie des normes d’une citoyenneté républicaine nationale. Ils ont en particulier étudié l’appropriation de l’acte électoral, de ses techniques et de sa discipline. L’enjeu est de pouvoir analyser la relation des individus avec ce qui se conçoit comme politique dans une société.

Les sociologues en sont venus à montrer que la politisation implique un certain niveau de compétence politique et, plus encore, un sentiment de compétence politique. Or, dans les faits, ceux-ci sont très inégalement distribués parmi la population. Les enquêtes ont également montré que les citoyens intéressés par la politique et en mesure de se repérer dans le champ politique restent peu nombreux et que cela est étroitement lié à leur position sociale et à leur niveau d’instruction. Cela va largement à l’encontre de l’idéal démocratique. La « ségrégation politique » que l’on observe dans les faits porte largement atteinte aux principes démocratiques.

Par ailleurs, on s’interroge sur le point de savoir si le fait de voter est en soi un indicateur de politisation alors qu’il peut ne correspondre, pour certains électeurs, qu’à une norme sociale, à un rituel peu ou pas investi politiquement. Au contraire, des personnes qui s’enferment dans l’abstention agissent de la sorte de manière très politique, souhaitant montrer ainsi leur rejet de toute la classe politique et/ou de toutes les institutions. Ils expriment une défiance à l’égard de la politique électorale et partisane.