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Le Parti pris des choses – Francis Ponge

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La banalité du monde transfigurée

La forme prend une place importante dans l’œuvre de Francis Ponge : le poète tend à explorer, à travers son recueil, le monde dans son prosaïsme le plus complet, relevant de l’infra-ordinaire.

Ainsi, dans Le Parti pris des choses (1942), il accorde une dimension nouvelle aux objets méprisés par la poésie classique, tels le cageot, la bougie, le pain, le savon ou encore la cigarette ou l’orange.

Le poète se rapproche du matérialisme développé par le philosophe romain Lucrèce dans son œuvre en vers intitulée De la nature des choses (Ier siècle avant J.-C.). Il entend faire la description des éléments « de leur propre point de vue », selon une démarche proche de celle du scientifique, ce qui confère au poème une dimension encyclopédique, issue de son observation du monde.

Aussi, énonce-t-il ses principes poétiques dans son poème « L’œillet » : « Étant donné une chose – la plus ordinaire soit-elle – il me semble qu’elle présente toujours quelques qualités vraiment particulières sur lesquelles, si elles étaient clairement et simplement exprimées, il y aurait opinion unanime et constante : ce sont celles que je cherche à dégager. » (Le Parti pris des choses, 1942)

Influence sur la pensée contemporaine

La publication du recueil Le Parti pris des choses en 1942 contribue à diffuser la conception qu'a Ponge de la poésie auprès des écrivains et philosophes d’inspiration phénoménologique, notamment auprès d’Albert Camus qui lui fait parvenir le manuscrit du Mythe de Sisyphe (1942), mais aussi auprès de Jean-Paul Sartre qui rédige la préface du recueil lui-même.

La réflexion initiée sur le langage par Ponge se porte notamment sur l’acte de création comme il l'exprime dans La Rage de l’expression en 1952, avant de composer un véritable art poétique élaboré dans Pour un Malherbe écrit entre 1951 et 1957, mais publié seulement en 1965.

Ponge est alors considéré, dans les années soixante, comme un précurseur par les jeunes auteurs de la revue Tel quel, fondée en 1960, qui réunit les écrivains de la littérature de l’avant-garde. Son travail sur le langage l’amène à s’interroger sur l’expression de l’œuvre d’art dans L’Atelier contemporain (1977) qui s’intéresse, à la manière des Salons de Diderot au XVIIIe siècle ou de Baudelaire ou Zola au XIXe siècle, à la production d’artistes comme Braque, Vuillamy, Kermadec, Herold ou encore Picasso.

Enfin, Ponge reprend des textes anciens dont il publie, parfois dans leur intégralité, les brouillons ou les différentes versions successives qui les ont précédés (La Fabrique du pré, 1971 ; La Table, 1982).

Le choix de la prose

Ponge se définit comme le poète des choses, des objets, mais aussi comme le poète du langage, des mots qui ne peuvent restituer qu’un discours altéré par les défauts de l’expression, ce qu’il désigne par les termes de « rage de l’expression ». Il s’agit donc de s’exprimer « compte tenu des mots », ce qu’il entreprend de faire en se concentrant sur les capacités du langage à exprimer les choses les plus simples. Le poète fait le choix de la prose et abandonne le vers trop contraignant et moins naturel.

Il compose des pièces poétiques qui constituent de véritables « définitions-descriptions » s’appuyant sur l’étymologie et faisant de l’objet poétique « un objeu », néologisme pongien pour rendre compte de son travail sur le mot-objet, avant de devenir un objoie, néologisme pour désigner un objet qui donne de la joie : « Le mot OISEAU : il contient toutes les voyelles. Très bien, j’approuve. Mais à la place de l’s, comme seule consonne, j’aurais préféré l’L de l’aile : OILEAU, ou le v du bréchet, le v des ailes déployées, le v d’avis : OIVEAU. » (Notes prises pour un oiseau, dans Pièces.)

Il joue sur la sonorité des mots, notamment sur la paronomase (figure rapprochant deux mots de sonorité très ressemblante) « précipitations » et « précipitamment », et crée un double sens en évoquant la pluie par son synonyme « précipitations », ce qu’il désigne par le terme d’« amphibiguïté » (« Végétation » dans Le Parti pris des choses).

Il recourt aux onomatopées pour imiter le langage de la nature et aux néologismes afin de lier le mot et la réalité. Ponge se rapproche en ce sens du surréalisme par son travail sur le langage : « C’est seulement à partir des propriétés particulières de la matière verbale que peuvent être exprimées certaines choses – ou plutôt les choses. [...] S’agissant de rendre le rapport de l’homme au monde, c’est seulement de cette façon qu’on peut espérer réussir à sortir du manège ennuyeux des sentiments, des idées, des théories, etc. » (Pratique d’écriture ou l’inachèvement perpétuel, 1954).

Enfin, bien que rejetant le vers très normé de la poésie classique, il utilise la rime pour accentuer les effets comiques qu’il souhaite donner à son poème.

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