Dans un long entretien avec Frédéric-Yves Jeannet, Annie Ernaux prononce cette formule d’« écriture comme un couteau » pour désigner à la fois la rudesse, la sincérité et la présence du réel dans ses ouvrages. « J’importe dans la littérature quelque chose de dur, de lourd, de violent même, lié aux conditions de vie, à la langue du monde qui a été complètement le mien jusqu’à dix-huit ans, un monde ouvrier et paysan. »
Dans Les Années, il s’est agi d’inscrire dans l’Histoire l’existence d’une femme et, partant, celle des femmes et des hommes. En mêlant plusieurs mémoires, le roman est au carrefour de la littérature, la sociologie et l’histoire. La sincérité est aussi vérité collective.
En se différenciant du roman réaliste ou politique, Annie Ernaux choisit « l’écriture plate », factuelle, de constat, dépouillée d’affects et de jugements. Ni misérabiliste, ni populiste à propos de ceux qu’elle appelle « les dominés », elle écrit au plus près de la réalité qu’elle a connue.
Les Années – Annie Ernaux
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L’écriture comme un couteau 1
L’écriture comme un couteau 2
L’écriture comme un couteau 3
Temps et Mémoire dans Les Années 1
Temps et Mémoire dans Les Années 2
Temps et Mémoire dans Les Années 3
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Temps et Mémoire dans Les Années
Annie Ernaux se démarque d’une autobiographie qui aurait Rousseau pour modèle, et de toute réflexion proustienne sur le temps passé et la mémoire. Tout en posant des questions analogues, elle élabore une autre esthétique romanesque. Il ne s’agit plus d’opposer le passé regretté et l’avenir, mais de figurer le temps qui transforme continuellement les êtres, leurs pensées, leurs croyances et leurs goûts.
Dans l’impossibilité d’avoir un point de vue unique sur le monde, Les Années sont construites sur la vision d’une évolution incessante et sur la dimension d’un avenir en creux, impossible néanmoins à déterminer. Refusant tout message didactique, le roman se clôt sur la formule : « Sauver quelque chose du temps où l’on ne sera plus jamais… ».
L’écriture est un salut qui n’est pas la sauvegarde d’une somme d’événements personnels. Il s’agit de sauver collectivement l’époque et le monde dans lequel on a vécu.