Alors que la notion d’imitation insiste sur la production d’une illusion du réel par l’art, fondée sur la ressemblance, la notion de représentation insiste sur la manière dont l’art re-produit le réel en construisant l’œuvre.

Aristote a insisté dans la Poétique sur les processus propres aux arts représentatifs. Pour lui, l’art est une technique (poiesis), c’est-à-dire une façon de produire un objet, sa fin est extérieure à son mouvement, contrairement à l’action (praxis). L’art est de l’ordre du faire.

La question que pose Aristote est alors la suivante : quelle règle doit suivre un artiste, ou plus précisément un poète, pour que l'œuvre soit bonne et qu’on y croit ? Le critère de l’œuvre réussie c’est sa capacité persuasive : une bonne œuvre théâtrale peut produire, dans les spectateurs, la terreur et la pitié.

Pour cela, l’art ne doit donc pas imiter ce qui est, mais ce qui pourrait être :

la fonction du poète n’est pas de raconter ce qui est effectivement arrivé, mais les événements tels qu’ils pourraient arriver, c’est-à-dire ceux qui sont possibles selon la vraisemblance et la nécessité.

  1. Ce qui est c’est ce qui est contingent, hasardeux, alors que dans une pièce tout doit être lié. C’est l’exigence de nécessité : « Les faits doivent être amenés les uns par les autres ».
  2. En même temps, il ne faut pas que tout soit lié artificiellement, sinon on reconnaît la supercherie. Il faut que l’action soit plausible, de l’ordre du possible, de ce qui pourrait être. C’est l’exigence de vraisemblance.

La poésie lie les événements en fonction d’une fin (le dénouement) et introduit dans leur enchaînement une nécessité qui ne se trouve pas dans le réel. C’est une transposition, un passage dans la nécessité, pas une reproduction. Aristote insiste également sur l’unité de cette action nécessaire. Mais la transposition ne doit pas être trop importante pour qu’on reconnaisse quelque chose du réel et qu’on soit ému.

Le signe de cette transposition est que nous n’éprouvons pas les mêmes émotions devant la chose réelle et devant sa représentation :

les choses qui sont pénibles à voir, quand nous en voyons des images particulièrement réussies pour leur précision, nous nous plaisons à les regarder, images d’animaux les plus répugnants, et même de cadavres. La cause en est que le fait de s’instruire offre le plus grand agrément, non pour les seuls philosophes, mais aussi pour les autres hommes.

La poésie et l’art en général ont donc une fonction de divertissement (apporter du plaisir, movere) et cognitif (apporter de la connaissance, docere).