Si l’instauration de l’État est censée mettre fin à la guerre entre les individus, reste la question de la guerre entre États et donc de la possibilité d’un droit cosmopolitique, qui assure la paix internationale.

Une telle réflexion se heurte nécessairement à deux difficultés :

  • À l’idée de souveraineté, à la puissance absolue dont un État dispose sur son territoire et son peuple : dans quelle mesure un droit extérieur pourrait-il s’imposer à un État ? Ainsi, pour Hegel (Principes de la philosophie du droit, § 331), l’État n’existe que du fait d’une légitimité interne et d’une légitimité externe (l’État est reconnu par les autres États) ; cependant, cette reconnaissance suppose que chaque État soit souverain et rend impossible l’abandon d’une part de souveraineté.
  • À l’absence d’institutions juridiques et politiques qui fassent respecter le droit interétatique : que vaut un droit sans sanctions, sans force coercitive ? Rousseau critique, par exemple, le droit des gens (droit qui codifie les relations des États en temps de guerre) comme « chimérique » car dépourvu de sanctions.

Dans son Projet de paix perpétuelle (art. II), Kant, tout en refusant l’idée d’un État mondial qui dominerait les autres, évoque trois conditions de la paix perpétuelle :

  • La constitution républicaine des États, qui fait peser la responsabilité de l’entrée en guerre sur l’ensemble des citoyens et la rend improbable ;
  • L’existence d’une alliance durable entre des États fédérés, qui ne concerne que la question guerrière ;
  • Le droit cosmopolitique, droit d’hospitalité : « le droit qu’a chaque étranger de ne pas être traité en ennemi dans le pays où il arrive ». Kant pense ainsi un vivre-ensemble, fondé sur la commune propriété de la Terre par les hommes, qui favorise les rencontres et le développement des facultés humaines.

Les événements du XXe siècle ont appelé un renouvellement de cette perspective, en particulier à travers les nouvelles notions de crime de guerre et de crime contre l’humanité, qui ciblent des individus pour leur responsabilité collective.

Habermas a ainsi pensé une constitutionnalisation du droit international :

  • qui passe par la reconnaissance mutuelle des droits de l’homme comme valeurs universelles ;
  • et par la solidarité des différents citoyens du monde (plus que des États), capables d’éprouver une même indignation envers les violations des droits de l’homme et les crimes d’agression, et de s’abstraire de leurs conditions pour se mettre à la place des autres.