La sollicitation du spectateur est soumise à divers stimuli selon les intentions de l'artiste ou celles du commissaire d'exposition. Déjà dans les vitraux ou les chapiteaux gothiques ou romans, le message des œuvres s'adressait directement au spectateur. Souvent illettré, il pouvait comprendre la narration biblique par ces représentations. Les œuvres interpelaient ses sens et son intellect. C'est le même mécanisme qui est recherché par René Magritte avec son tableau La Trahison des Images ("Ceci n'est pas une pipe").
Marcel Duchamp prononça lors d’une conférence en 1914 que « ce sont les regardeurs qui font les tableaux » provoquant un changement de posture chez le spectateur. Il n'adopte plus une attitude seulement contemplative mais il est devenu actif, participatif, collaborateur voire même auteur.
Avec Prière de toucher (1947), Marcel Duchamp s'adresse directement au spectateur et l'invite à entrer en action, sacrilège d'alors, toucher une œuvre d'art !
Un pénétrable de Jesus Raphael Soto ne prend sens que si les spectateurs entrent dans l'œuvre, regardés par d'autres spectateurs, découvrant le dispositif immersif. Les machines à dessiner de Jean Tinguely, comme le Cyclograveur, ne se mettent en action que si un spectateur les déclenche ou les actionne. Le spectateur a un rôle participatif. Dans l'œuvre Café Little Boy de Jean-Luc Vilmouth (Centre Pompidou Paris) le public est invité à écrire ou à effacer des messages à l'aide de bâtons de craie de couleur sur les murs peints. Cette installation, en référence à l'exposition atomique d'Hiroshima, est évolutive : composée de 3 murs peints à l'aide de peinture verte pour tableaux d'écoliers, le spectateur est invité à devenir auteur de l'œuvre.
Avec le concept d'esthétique relationnelle, Nicolas Bourriaud (commissaire d'exposition, écrivain, critique d'art et théoricien), le corps du spectateur, son entité, son identité, ses liens aux autres font œuvre. Dans A+ (2008-2012), Thierry Fournier filme les passants et fait défiler leurs déplacements quotidiens, dans cette rue commerçante lilloise, mais avec 24h de retard. Le spectateur fait l'œuvre. Sans sa présence, l'œuvre perd son sens.