1) Matrice rectangulaire
Une matrice de taille n×p à coefficients dans K est un tableau à n lignes et p colonnes d'éléments appartenant à K.
Une matrice de taille n×p se note A=(ai,j)1≤i≤n1≤j≤p ou de façon "développée":
A=(a1,1…a1,p⋮ai,j⋮an,1…an,p).
ai,j∈K désigne le coefficient de la matrice A situé à la ligne i et la colonne j.
Mn,p(K) désigne l'ensemble des matrices de taille n×p à coefficients dans K.
2) Multiplication matricielle :
Soit A=(ai,j)1≤i≤n1≤j≤p un élément de Mn,p(K).
Soit B=(bi,j)1≤i≤p1≤j≤q un élément de Mp,q(K).
On définit C=A×B de la façon suivante :
C∈Mn,q(K) autrement dit C est une matrice de taille n×q. Les coefficients de la matrice C sont définies par :
∀(i,j)∈{1,…,n}×{1,…,q}ci,j =∑pk=1ai,kbk,j =ai,1b1,j+ai,2b2,j+…+ai,pbp,j.
Pour se rappeler de cette formule, on dispose la matrice A en bas à gauche et la matrice B en haut à droite.
Le coefficient ci,j est situé à l'intersection de la ligne i de la matrice A et de la colonne j de la matrice B. Pour se remémorer la formule, il faut prendre les coefficients de la matrice A qui sont sur la même ligne que ci,j et les coefficients de la matrice B qui sont sur la même colonne que ci,j.
Par ailleurs la taille de la matrice C est imposée par la disposition ci-dessus.
En effet, on observe que le nombre de lignes de la matrice C est égal au nombre de lignes de la matrice A et le nombre de colonnes de la matrice C est égal au nombre de colonnes de la matrice B.
Exemple :
Soient A=(210131)
et
B=(32−12520−1).
Il n'est pas possible de calculer B×A car le nombre de colonnes de B n'est pas égal au nombre de lignes de A.
Il est possible de calculer A×B car (3×2)×(2×4)→3×4.
On obtient :
A×B=(116−23520−1148−35).
3) Méthodes pour calculer Ap quand A est une matrice carrée.
a) On calcule les premières puissances de A et on conjecture une formule générale que l'on montre par récurrence.
Exemple : posons E la matrice carrée d'ordre n remplie de 1.
Alors E2=nE. Donc E3=E2×E=nE2=n2E.
On conjecture que Ep=np−1E ; on montre cette formule par récurrence sur p.
Attention cette formule n'est valable que pour p≥1 car par définition E0=I (=la matrice identité ou unité = la matrice diagonale de coefficient 1).
b) On décompose A et on utilise la formule du binôme de Newton.
Remarque si A et B sont des matrices carrés d'ordre n (c'est-à-dire le nombre de lignes = nombre de colonnes =n), (A+B)2=A2+B2+AB+BA.
On ne peut pas simplifier davantage sans hypothèse supplémentaire sur les matrices A et B.
Si A et B commutent c'est-à dire si A×B=B×A alorson a la théorème suivant (c'est la formule du binôme de Newton pour les matrices) :
(A+B)p=p∑k=0(pk)AkBp−k.
L'idée est de décomposer A=A1+A2 avec A1 et A2 des matrices qui commutent. On peut alors utiliser la formule du binôme de Newton :
(A1+A2)p=∑pk=0(pk)Ak1Ap−k2.
On espère ensuite que le calcul des puissances Ak1 et Ap−k2 soient simples afin de calculer la somme.
Les matrices dont les puissances sont simples à calculer sont par exemple :
- Les matrices diagonales
- Les matrices nilpotentes qui sont définies ci-dessous
En effet, pour les matrices diagonales, on a :
Si D=diag(α1,…,αn), alors, pour tout p∈N : Dp=diag(αp1,…,αpn).
Une matrice nilpotente est une matrice A de Mn(K) telle qu'il existe un entier q tel que Aq=0.
Exemple :
Calculer Ap=(302020003)p pour tout p∈N.
Décomposons la matrice :
A=(300020003)⏟=D+(002000000)⏟=N.
Nous avons décomposé A en la somme d'une matrice diagonale et d'une matrice dont on montrera qu'elle est nilpotente.
Vérifions que D et N commutent. On a :
DN=ND=(006000000).
Donc on peut utiliser la formule du binôme de Newton :
Ap=(D+N)p=p∑k=0(pk)Dp−kNk.
Par puissance d'une matrice diagonale, on a :
Dp−k=(3p−k0002p−k0003p−k).
Par ailleurs, un calcul donne N2=0M3(R) donc N est une matrice nilpotente. On en déduit que Nk=0M3(R) dès que k≥2.
Découpons la somme en deux parties :
Ap=1∑k=0(pk) Dp−kNk+p∑k=2(pk)Dp−kNk⏟=(0).
On a donc Ap=1∑k=0(pk)Dp−kNk
Attention : ce n'est pas parce que la somme s'arrête à k=1 que p=1 !! p reste p !!
On a :
Ap=(p0)Dp−0 N0+(p1)Dp−1N1 =DpI3+pDp−1N =Dp+pDp−1N
Donc Ap=(3p0002p0003p)+p(3p−10002p−10003p−1) (002000000).
Après calcul, on obtient :
Ap=(3p02p3p−102p0003p)
Test de cohérence :
- Pour p=0, on retrouve bien la matrice I3
- Pour p=1, on retrouve bien la matrice A
c) On utilise un polynôme annulateur et un division euclidienne.
Soit P un polynôme annulateur de la matrice A c'est-à-dire un polynôme vérifiant P(A)=0. On effectue la division euclidienne de Xp par P : il existe une unique couple de polynômes (Q,R) tel que Xp=Q(X)P(X)+R(X) avec le degré de R< au degré de P.
En remplaçant X par A : Ap=Q(A)P(A)+R(A)=R(A) car P(A)=0.
4) Calcul de l'inverse d'une matrice.
a) Définition
Une matrice carrée A de Mn(K) est inversible s'il existe une matrice B∈Mn(K) tel que A×B=In.
Dans ce cas, B s'appelle l'inverse de A et se note A−1.
On note GLn(K) l'ensemble des matrices inversibles de Mn(K).
Remarque : si A×B=In alors nécessairement B×A=In.
Théorème : une matrice est inversible si et seulement son rang est égal à son ordre (c'est-à-dire au nombre de lignes = nombre de colonnes).
b) Méthode pour inverser une matrice
- On écrit le système (S):AX=Y d'inconnue X et de second membre Y
- On le résout à l'aide de la méthode du pivot de Gauss
- On détermine en cours de route le rang de la matrice. Si le rang est maximum, la matrice est inversible. On peut continuer la résolution du système (S)
- On obtient l'expression de X en fonction de Y:X=A−1Y. La lecture des coefficients devant les yi fournit les coefficients de la matrice inverse A−1
Exemple :
A=(−12321−130−2).
On considère donc le système :
(S){−x1+2x2+3x3=y12x1+x2−x3=y23x1−2x3=y3
On utilise la méthode du pivot de Gauss sur :
(−123y121−1y230−2y3).
On effectue les opérations : L2←L2+2L1 et L3←L3+3L1 :
(−123y1055y2+2y1067y3+3y1).
Puis l'opération L3←5L3−6L2 :
(−123y1055y2+2y10053y1−6y2+5y3).
Le rang de la matrice est 3 car il y a 3 pivots dans la matrice est inversible.
Le système linéaire correspondant est :
(S){−x1+2x2+3x3=y15x2−5x3=2y1+y25x3=3y1−6y2+5y3
On en déduit que x3=35y1−65y2+y3 puis en remontant les équations : x2=−15y1+75y2−y3 puis x1=25x1−45x2+y3
On a donc :
{x1=25x1−45x2+y3x2=−15y1+75y2−y3x3=35y1−65y2+y3
On en déduit que :
A−1=(2/5−4/55/5−1/57/5−5/53/5−6/55/5) =15(2−45−17−53−65)
On vérifie que AA−1=I3 ou plus simplement pour ne pas s’embarrasser avec les fractions que :
A×(5A−1)=(−12321−130−2) (2−45−17−53−65) =5I3.
Autre méthode : on connaît un polynôme annulateur de A. Dans ce cas, on essaie d'isoler In dans la relation si c'est possible.
Par exemple, supposons que A vérifie la relation 4A2−A+3I=0 autrement dit le polynôme P(X)=4X2−X+3 est un polynôme annulateur.
On isole I dans la relation : 3I=−4A2+A donc I=−43A2+13A =A×13(−4A+I).
On en déduit que A est inversible et que A−1=13(−4A+I).