I) Il s'agit d'une suite définie par un premier terme $u_0$ puis par la relation de récurrence $u_{n+1} = f(u_n)$.
Dans le plan d'étude qui suit, certains points se font simultanément et pas forcément dans l'ordre indiqué.
- Commencer par vérifier que la suite $(u_n)$ est bien définie. On détermine l'ensemble de définition $D$ de $f$. On prouve par récurrence $\forall n \in {\Bbb N}$, $u_n\in D$.
- Déterminer des intervalles stables par $f$ c'est-à-dire des intervalles $I$ vérifiant $\forall x \in I$, $f(x) \in I$. (Cela demande éventuellement de faire une étude de la fonction $f$).
Si $I$ est un intervalle stable et si $u_0 \in I$ alors $\forall n \in {\Bbb N}$, $u_n \in I$ (récurrence immédiate).
- Etudier la fonction $f$ et le signe de $\delta(x) = f(x)-x$ sur l'intervalle $I$ déterminé précédemment. Pour déterminer le signe de $\delta$, on est amené éventuellement à faire une étude de la fonction $\delta$.
- Faire le graphe de $f$ en tenant compte du signe de $\delta$ qui donne la position de la courbe $y=f(x)$ et de la première bissectrice c'est-à-dire la droite d'équation $y=x$. Représenter les premiers termes de la suite $(u_n)$ (on s'aide de la première bissectrice pour reporter les $u_n$ sur l'axe des abscisses) et émettre des conjectures quant à son sens de variation et sa nature (c'est-à-dire sa convergence ou sa divergence).
Si $u_0$ n'est pas fixé, il faut éventuellement faire des cas selon la position de $u_0$.
- On prouve les conjectures. On se base sur trois théorèmes :
- Théorème : si $f$ est croissante sur $J$ (un sous-intervalle de $I$) et si la suite $(u_n)$ est dans $J$ alors le sens de variation de $(u_n)$ est donné par le signe de $u_1-u_0$.
(Pour prouver que la suite $(u_n)$ est dans $J$ faire une récurrence). - Théorème : si $f$ est continue sur $I$ et si $(u_n)$ converge alors $(u_n)$ converge nécessairement vers un point fixe de $f$ c'est-à-dire une solution de l'équation $f(x)=x$ ou $\delta(x)=0$.
- Théorème de la limite monotone :
- si la suite $(u_n)$ est croissante et majorée alors $(u_n)$ converge.
- si la suite $(u_n)$ est décroissante et minorée alors $(u_n)$ converge.
- si la suite $(u_n)$ est croissante et non majorée alors $(u_n)$ diverge vers $+\infty$
- si la suite $(u_n)$ est décroissante et non minorée alors $(u_n)$ diverge vers $-\infty$
Remarques :
- Dans le cas où $f$ est décroissante, on ne peut rien dire sur le sens de variations de la suite $(u_n)$. Il faut parfois étudier les sous-suites d'indices pairs et d'indices impairs.
- Parfois on utilise le fait que $f$ est $k$-lipschitzienne c'est-à-dire vérifie $|f(x) -f(y)| \le k|x-y|$.
En remplaçant $x$ par $u_n$ et $y$ par un point fixe $a$ de $f$ : $|f(u_n) -f(a)| \le k|u_n-a|$ soit $|u_{n+1}-a| \le k|u_n-a|$ ce qui donne par récurrence $|u_n-a| \le k^n|u_0-a|$. Si la constante $k$ est $<1$, on peut alors conclure sur la convergence de la suite $(u_n)$ vers $a$.
II) Exemple
On considère la suite $(u_n)$ définie par :
$\left\{
\begin{array}{l}
u_0 = a \in {\Bbb R}\\
\forall n \in {\Bbb N}, u_{n+1} =
u_n^2+2u_n
\end{array}
\right.$
- $(u_n)$ est une suite du type $u_{n+1} = f(u_n)$ avec $f(x) = x^2+2x$. Comme $f$ est définie sur ${\Bbb R}$, la suite $(u_n)$ est bien définie.
- Comme intervalle stable, on voit qu'il y a par exemple ${\Bbb R}^+$ car si $x \ge 0$ alors $f(x) \ge 0$ ce qui montre que si le premier terme $u_0=a$ est positif alors toute la suite $(u_n)$ est positive. Il y a peut-être d'autres intervalles stables. On le précisera plus bas.
Comme on ne sait pas où est $u_0$, on est amené à étudier $f$ sur ${\Bbb R}$ tout entier.
- $f$ est une fonction polynomiale donc dérivable sur ${\Bbb R}$ et $\forall x \in {\Bbb R}, f'(x)=2x+2$
On en déduit que les variations de $f$ sur ${\Bbb R}$.
FIGURE 1
Etude du signe de $\varphi(x)=f(x)-x$. On a $\varphi(x) = x^2+x = x(x+1)$. On en déduit le signe de $\delta$ :
FIGURE 2
4) Représentation des premiers termes de la suite :
FIGURE 3
On conjecture le comportement de la suite à l'aide du dessin.
- Si $u_0 > 0$ alors $(u_n)$ semble croissante et diverger vers $+\infty$
- Si $-2
- Si $u_0 < -2$ alors on est ramené au premier cas car $u_1>0$.
Cas particulier :
- Si $u_0=-1$ alors $(u_n)$ est la suite constante en $-1$.
- Si $u_0=0$ alors $(u_n)$ est la suite constante en $0$.
- D'après le tableau de variation de $f$, l'intervalle $[-1,+\infty[$ est un intervalle stable donc si $u_0$ est dans $[-1,+\infty[$ alors toute la suite $(u_n)$ est dans $[-1,+\infty[$.
On a donc que $f$ est croissante sur $[-1,+\infty[$ et $\forall n \in {\Bbb N}$, $u_n \in [-1,+\infty[$. On en déduit par théorème que la suite $(u_n)$ est monotone. Son sens de variation est donné par le signe de $u_1-u_0=f(u_0)-u_0 = \delta(u_0)$.
D'après l'étude du signe de $\delta$, on en déduit que :
Si $u_0 \in ]-1,0[$ alors la suite $(u_n)$ est décroissante.
Si $u_0 \in ]0,+\infty[$ alors la suite $(u_n)$ est croissante.
- Supposons $u_0 \in ]-1,0[$. On a vu que $(u_n)$ est décroissante.
On a montré aussi que $(u_n)$ est minorée (par $-1$).
Par le théorème de la limite monotone, $(u_n)$ converge.
D'après le théorème sur la convergence d'une suite définie par récurrence, $(u_n)$ converge vers un point fixe de $f$ c'est-à-dire $0$ ou $-1$.
Démontrons que $(u_n)$ ne converge pas vers $0$.
Comme la suite $(u_n)$ est décroissante, $\forall n \geq 0$: $u_n \leq u_0$ donc par le théorème de passage à la limite, $\lim_{n \rightarrow +\infty}u_n \leq u_0$. Comme $u_0 < 0$, on en déduit que $\lim_{n \rightarrow +\infty}u_n<0$ et donc ne peut-être égale à $0$.
Conclusion : $(u_n)$ converge vers $-1$.
- Supposons $u_0 \in ]0,+\infty[$. On a vu que $(u_n)$ est croissante.
Supposons par l'absurde que $(u_n)$ soit majorée. Comme $(u_n)$ est croissante, par le théorème de la limite monotone, $(u_n)$ converge.
D'après le théorème sur la convergence d'une suite définie par récurrence, $(u_n)$ converge vers un point fixe de $f$ c'est-à-dire $0$ ou $-1$.
Or $(u_n)$ est croissante donc $\forall n \geq 0$: $u_n \geq u_0$ donc par le théorème de passage à la limite, $\lim_{n \rightarrow +\infty}u_n \geq u_0$. Comme $u_0 > 0$, on en déduit que $\lim_{n \rightarrow +\infty}u_n>0$ et donc la limite de la suite $(u_n)$ ne peut pas être égale ‡ $-1$ ou $0$. Contradiction.
Donc la suite $(u_n)$ n'est pas majorée.
$(u_n)$ est croissante et $(u_n)$ n'est pas majorée donc par le théorème de la limite monotone, $(u_n)$ diverge vers $+\infty$.
- Cas $u_0<-1$ :
Si $u_0<-1$, comme $f$ est strictement décroissante sur $]-\infty,-1[$, on a $f(u_0) > f(-1)=-1$ donc $u_1>-1$.
Plus précisément :
- Si $u_0<-2$ alors $u_1=f(u_0)>f(-2)=0$ donc d'après l'étude précédente, la suite $(u_n)_{n \geq 1}$ diverge vers $+\infty$.
La suite $(u_n)_{n \geq 0}$ a le même comportement asymptotique que la suite $(u_n)_{n \geq 1}$ donc $(u_n)_{n \geq 0}$ diverge vers $+\infty$.
- Si $-2
Synthèse :
- Si $u_0 \in ]-\infty,-2[ \cup ]0,+\infty[$ alors $(u_n)$ diverge vers $+\infty$.
- Si $u_0 = -2$ ou $0$ alors $\lim_{n\rightarrow +\infty}u_n=0$.
- Si $u_0 \in ]-2,0[$ alors $\lim_{n\rightarrow +\infty}u_n=-1$.