La représentation de 1789 mise en place par le Théâtre du Soleil se trouve dans l’un des bâtiments de l’ancienne Cartoucherie, après des répétitions au Palais des Sports, où était disposé le montage des décors venant du Piccolo Teatro de Milan à l’initiative de Paolo Grassi. L’espace de la Cartoucherie est, en effet, propre à devenir un lieu de production, de répétition, de représentation et de stockage des décors. En effet, situé dans le bois de Vincennes, les anciens bâtiments militaires abandonnés aux portes de Paris offraient le lieu idéal pour la troupe afin de travailler sur la mise en scène de 1789, qui était calibré à partir des dimensions d’un terrain de basket-ball (14 m X 26m). Le premier des trois halls (1600 m2) sert aux représentations publiques ; le deuxième sera transformé en salle de répétitions, le troisième en atelier pour les décors, les costumes et la technique.

Ce lieu permet, dès lors, à la troupe de proposer une alternative à l’architecture classique du théâtre : c’est l’espace couvert qui prime sur les prouesses architecturales associées à l’édifice théâtral, ce qui renforce le lien entre le théâtre et les spectateurs en offrant un cadre plus simple et plus populaire au spectacle. Composé de plusieurs bâtiments industriels en briques rouges, l’ensemble se caractérise par ses dimensions, son aspect nu et brut, dénué de tout ornement : la charpente est métallique et le sol en béton, tel un simple hangar. 

La salle de répétition s’étend de 18 mètres sur 45, tandis que les proportions de la deuxième salle, le lieu de la représentation, sont le double de la première. Le lieu de la représentation dispose de rangées de gradins et d’un dispositif scénique. Tout l’espace peut être modulé : une variété de configurations est rendue possible. La scène peut se trouver au centre, ou être bifrontale, ou encore intégrer le public dans un processus expérimental d’immersion dans l’espace de jeu. 

Pour la représentation de 1789, le décor conçu par Roberto Moscoso et Guy-Claude François reste particulièrement épuré, naturel et réduit à l’essentiel : faible lumière, pas de rampe séparant le public des comédiens, pas de caisses ni de guichets pour accueillir les spectateurs à l’entrée, pas de loges où les artistes se maquillent et s’habillent. Les comédiens se changent et se préparent derrière les gradins. Le lieu se trouve aux antipodes du théâtre classique à l’Italienne : les spectateurs sont installés ensemble, sans séparation ni distinction sociale. Les éléments techniques sont discrets, mais visibles. La salle est divisée en deux nefs séparées par des colonnes : la première contient les gradins des spectateurs, la seconde cinq tréteaux reliés par des passerelles proposant un spectacle simultané et une étrange proximité avec les spectateurs au milieu desquels les comédiens se déplacent.