En tant que champ de pratiques sociales, l’éducation et la formation sont restreintes à leur forme institutionnelle (scolaire pour l’une, professionnelle pour l’autre). Ce rapport les désigne selon leur sens premier, mais aussi selon le développement individuel et collectif. Comme le défendent depuis longtemps anthropologues et philosophes, éduquer et former, ce n’est pas que « apprendre à lire, à écrire et à compter » ou dans le champ professionnel « apprendre à reproduire un geste de métier », c’est aussi donner une forme à soi-même pour donner forme à une société. C’est et ce à tous les âges de la vie, apprendre à vivre avec soi et avec les autres ; mais c’est aussi et plus que jamais, dans une société en tension, une manière à partir du passé de construire l’avenir. Il n’y a ni une éducation, ni une recherche en éducation, mais des formes différentes, tantôt complémentaires, tantôt opposées.
Bien que l’apprentissage de nouvelles notions reste un point central dans notre système éducatif, le développement de l’esprit critique est devenu aujourd’hui fondamental pour l’éducation d’un citoyen averti. En effet, malgré l’avancée technologique, la recrudescence de la superstition et de l’absurdité dont parle le philosophe sont bien présentes dans notre société.
La priorité des problèmes d’efficacité, de justice et d’utilité de l’éducation a réduit au silence un thème ancien : celui de la fonction éducative de l’école. En effet, on admet facilement, comme au lendemain des attentats, que le rôle de l’école n’est pas seulement dévolu à l’acquisition de savoirs, à la hiérarchisation des élèves et aux relations des diplômes et de l’emploi. Pour reprendre Durkheim, l’école a une fonction « morale », c’est-à-dire qu’elle joue un rôle essentiel dans la formation des citoyens et des individus, et de leur esprit critique avec des méthodes pédagogiques, de la discipline scolaire, de la vie jeune, des représentations de l’autonomie et de l’autorité, par tout ce qui outrepasse la seule transmission des savoirs.
Bien sûr, ce rôle éducatif, cette « formation du caractère » est affirmé de manière coutumière, surtout dans des moments de crise et d’élections, mais il y a encore du chemin entre l’affirmation des principes à l’observation des pratiques. Cet ensemble de questions semble être abandonné aux essayistes et aux idéologues quand la recherche ne semble s’en soucier que dans les cas de violences, d'échec, de harcèlement et de conflits.