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La littérature d'idées et la presse du XIXe siècle au XXIe siècle

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Les genres de l’argumentation

Certains genres littéraires sont dits argumentatifs dans la mesure où ils défendent une ou plusieurs thèses de façons indirecte ou directe.

  • Les apologues sont de courts récits émettant une thèse ou une morale indirectement : c’est le cas de la fable (court récit imagé, La Fontaine), du conte philosophique (récit imaginaire à la structure simplifiée) et de l’utopie (représentation d’une société idéale et imaginaire proposant un modèle social).
  • L’essai, texte en prose proposant une réflexion personnelle sur des thèmes abstraits, argumente directement. Il en va de même pour le discours, la maxime (argumentation à visée universelle) et l’article de dictionnaire dont la définition d’une notion peut servir de prétexte à l’expression personnelle d’une thèse.

Les quatre grands types de raisonnements

Reconnaître le type de raisonnement, dans le cadre d’une argumentation, c’est comprendre les intentions du locuteur vis-à-vis de son lecteur.

  • Il est déductif quand il part d’une loi générale afin d’en déduire un cas particulier.
  • Inversement, il est dit inductif quand le cas particulier permet la déduction vers une loi générale. C’est alors l’expérience du locuteur qui valide le propos.
  • Il peut être analogique quand il passe par le rapprochement entre deux choses, deux idées.
  • Le raisonnement concessif considère l’argument adverse pour lui opposer d’autres arguments.

D’autres types existent, mais apparaissent moins fréquemment : les raisonnements par l’absurde, dialectique et critique. 
Ils peuvent être mêlés au sein d’un même discours.

Les différents arguments

Les arguments sont des éléments indispensables pour soutenir ou réfuter une thèse et peuvent se présenter sous différentes formes.

  1. L’argument logique

Il adopte une démarche presque scientifique par la déduction qui se fonde sur une loi générale pour valider un fait particulier :

« Tous les hommes sont mortels, Socrate est un homme. Donc Socrate est mortel ».

Il s’agit ici d’un syllogisme puisque l’argument s’appuie sur deux propositions pour en déduire une troisième, par l’induction qui opte pour une démarche inverse à celle de la déduction.

  1. L’argument d’autorité

Il renvoie au jugement d’une personne ou d’une institution dont la valeur est incontestable : Montaigne affirme que tout homme porte en lui la forme entière de l’humaine condition. En qualité de représentant du courant humaniste, l’approche de Montaigne apparaît comme incontestable.

  1. L’argument d’expérience

Il se base sur l’observation et l’expérience d’une personne pour qui le constat est une vérité absolue : pour Victor Hugo, le poète doit mener les hommes au combat. Pour d’autres poètes, la fonction de la poésie peut être différente même si celle d'Hugo est valable.

  1. L’argument par analogie

Il rapproche une idée abstraite d’un exemple concret :

« Une classe sans professeur est un navire sans commandant ».

Les exemples doivent toutefois appuyer les arguments. Ils doivent être précis et renvoyer à des réalités concrètes. L’exemple peut être plus ou moins long, lorsqu’il est longuement développé, il peut constituer la base d’un texte argumentatif comme c’est le cas dans les fables.

La délibération

Délibérer, du latin « deliberare », « réfléchir mûrement, trancher décider », demande à considérer différents points de vue. Celui qui parle, conseille ou dissuade son destinataire pour faire adopter ou rejeter une idée. Dans l’action de délibérer, il est question de confronter différentes idées pour arriver à un jugement.

Aristote définit la délibération comme genre majeur de l’argumentation car elle demande la prise en compte de points de vue différents dans le but de prononcer un jugement.

L’historique de la délibération montre qu’elle a adopté différentes formes : débat à caractère politique dans l’Antiquité, discussion à caractère moral au Moyen Age et à caractère philosophique au XVIème siècle, dialogue dans les salons littéraires aux XVIIème et XVIIIème siècles, débat de justice ou parlementaire au XXème siècle.

Dans la littérature, la délibération est présente dans de nombreux genres :

  • le théâtre,
  • le roman,
  • la nouvelle,
  • la poésie,
  • l‘essai,
  • le dialogue,
  • l‘épistolaire,
  • l‘apologue…

Présentée dans la plupart des cas comme une recherche de solution ou de jugement, la délibération propose des idées toujours contradictoires provenant d’un ou de plusieurs interlocuteurs à travers un monologue ou un dialogue. Dans les deux cas, les arguments et les idées progressent par étapes successives. Dans un débat d’idées, la confrontation des points de vue soumis à des contradictions et à des oppositions doit inévitablement mener à une unique prise de position.

Ainsi, dans les textes, la délibération est caractérisée par :

  • De nombreuses figures d’opposition:
    • antithèse,
    • antiphrase,
    • paradoxe,
    • oxymore.
  • Une ponctuation expressive :
    • points d’interrogation,
    • d’exclamation,
    • de suspension qui soulignent l’inachèvement des phrases.
  • Des questions rhétoriques. 

Enfin, tout peut être propice à la délibération : 

  • les sciences,
  • la philosophie,
  • les lettres,
  • l’art en général. 

Un film, un œuvre littéraire, un tableau, une sculpture, une architecture… sont autant d’éléments qui suscitent un débat.

Le fonctionnement du discours

Le discours est défini par une communication qui réunit un « locuteur » et un « interlocuteur », qui peut prendre différents aspects (une seule personne ou un public). L’argumentation n’est possible que s’il existe un interlocuteur. La démarche persuasive est mise en œuvre pour séduire l’auditoire.

  1. Le locuteur

La communication répond à une démarche simple : un locuteur, appelé aussi émetteur, transmet un message à un interlocuteur, appelé aussi récepteur. Le message est essentiellement verbal. Le message est transmis au moyen d’un « médium », c’est-à-dire que la façon dont est transmis le message peut varier et avoir une influence plus ou moins grande sur le message lui-même, par exemple : une lettre, un manifeste, une dissertation…

  1. L‘interlocuteur

Le message transmis, c’est-à-dire ce dont on parle, renvoie à un concept propre à ce que l’on dit. Le « référent » constitue l’image mentale transmise par le message. L’interlocuteur doit être considéré comme un ensemble d’interlocuteurs différents qu’il faut influencer par l’argumentation. Il peut être un adversaire dont il faut démonter les arguments, mais peut aussi se présenter comme un partenaire dont les arguments sont à considérer. Il s’avère indispensable de bien connaître son interlocuteur pour mettre en place une stratégie argumentative, qui peut varier, dans le fond et dans la forme, selon la personne ou le public concerné.

Le discours argumentatif

La rhétorique, l’art de bien parler, naît dans l’Antiquité. Dans les démocraties antiques, les sophistes, maîtres de rhétorique et de philosophie, parcouraient les villes pour dispenser leur enseignement qui s’orientait dans quatre directions : les problèmes de la société, l’explication et le développement des idées des écrivains célèbres, l’improvisation laissant la parole à un orateur pour prouver son adresse verbale, la participation de différentes personnes soumises à tous types de questions auxquelles elles devaient répondre avec éloquence sous peine de laisser la place à d’autres. Ils proposaient un affrontement d’idées fondées sur la raison soumise à la critique. Ce qui donnera plus tard le débat.

En parallèle, se dessine l’idée selon laquelle la littérature doit répondre à des règles strictes de rhétorique. L’écrivain doit faire abstraction de ses états d’âme au profit d’un discours structuré et pertinent. Ces philosophes de l’Antiquité reprochent aussi à la rhétorique d’occulter toute morale dans le discours. Platon, dans le Critias, décrit la rhétorique comme un simple moyen de divertissement parfois injuste dans la mesure où elle se base essentiellement sur l’apparence et sur la maîtrise verbale du sophiste qui ne tient pas compte de ceux qui ne savent pas s’exprimer. Elle doit, selon le philosophe, définir les valeurs morales du bien et du mal. Aristote, lui, défend la rhétorique en tant que moyen de valoriser le bien.

Au Moyen Âge, la rhétorique connaît un certain déclin. Elle sert essentiellement à la création de sermons et nécessite une parfaite maîtrise du latin. Au XVIème siècle, la rhétorique est représentée principalement par Érasme (1469-1536) qui, grâce à son œuvre Duplici Copia Verborum et Rerum (1512), propose une analyse de la rhétorique, à savoir : considérer la forme et le fond du discours.

Au XVIIème siècle, la littérature veut bannir toute intrusion de mots dits populaires dans les textes et propose l’usage excessif de figures de rhétorique pour combler le manque de vocabulaire dû à la volonté de s’exprimer en langage soutenu. Parallèlement, l’argumentation classique laisse place à la logique. La logique est une branche de la philosophie se fondant sur un discours mathématique. La vérité et la connaissance sont régies par la démonstration, l’expérimentation.

De nombreux auteurs après Descartes (1596-1650), essentiellement au XVIIIème siècle, optent pour une démarche expérimentale dans leurs discours. Les romantiques s’imposent en détracteurs de la rhétorique classique et défendent un idéal de sincérité.

Au XXème siècle, de nombreux auteurs défendent un travail élaboré sur la langue qui doit permettre d’exprimer précisément ce que l’on veut dire. La rhétorique est aussi étroitement liée à la psychanalyse par le rapport qui s’établit entre le langage et l’inconscient qui permet à l’argumentation de se réorienter vers la recherche d’idées et non plus uniquement vers un souci de bien s’exprimer. Ainsi, la rhétorique retrouve ses fonctions originelles.

L’honnête homme au XVIIe siècle

L’honnête homme, du latin « honestus » signifiant « honorable », se doit d’incarner l’idéal classique. Il est caractérisé par le refus de tout excès, guidé par la raison.

Cette conception de l’homme se retrouve inévitablement dans les textes où il apparaît capable de maîtriser ses sentiments et ses émotions pour mieux s’adapter au monde dans lequel il évolue. Il se montre aussi cultivé et ouvert d’esprit, ce qui lui permet d’exceller dans l’art de la conversation, en toute simplicité, s’opposant ainsi à la figure du pédant. C’est un homme de cour qui détient de nombreuses qualités sociales lui permettant de plaire.

Cet art de plaire est une constante de la société et de la littérature de l’époque. Il s’agit, au même titre que les textes classiques, de plaire et d’instruire à la fois.

L’idéal classique et l’honnête homme sont pratiquement indissociables dans la mesure où tous deux s’imposent en modèles pour perdurer dans le temps.

Les connecteurs

Appelés connecteurs logiques, ils permettent d’articuler les différentes étapes de l’argumentation et de mettre en évidence la relation logique établie entre les arguments en vue de la conclusion.

Ils peuvent être classés selon une fonction précise : 

  • L’opposition :
    • mais,
    • en revanche,
    • cependant,
    • au contraire,
    • or,
    • néanmoins,
    • toutefois,
    • par ailleurs.
  • La succession :
    • d’abord,
    • puis,
    • ensuite,
    • de plus,
    • en outre,
    • enfin.
  • La concession :
    • bien que,
    • quoique,
    • malgré,
    • encore que.
  • La cause :
    • car,
    • parce que,
    • puisque,
    • étant donné que.
  • La conséquence :
    • donc,
    • ainsi,
    • si bien que,
    • de sorte que,
    • c’est pourquoi.

L’essai

L’essai est un genre littéraire caractérisé par une littérature en prose, argumentative où la présence de l’auteur est nettement marquée par l’utilisation de la première personne. Dans son essai intitulé L’Éducation des filles (1933), François Mauriac (1885-1970) utilise la première personne et fait référence à son expérience personnelle de père pour réfléchir sur le problème.

L’essai utilise le plus souvent une écriture personnelle à travers laquelle l’auteur livre une réflexion, voire ses impressions. Dans De l’Éducation des filles (1687), Fénelon (1651-1715) apporte son jugement en critiquant l’éducation donnée aux filles et aux garçons. Il en vient même à accuser les mères de négligence et d’ignorance face à la façon d’éduquer leurs filles.

Les sujets traités sont essentiellement d’ordre philosophique, moral, politique, artistique et parfois religieux. On considère que c’est Montaigne (1533-1592) qui crée le genre en intitulant son œuvre Essais. Ses Essais sont composés de 107 chapitres répartis en trois livres qui suivent le cheminement de la pensée et embrassent toutes les préoccupations humaines. Le travail de l’essayiste rejoint celui de l’homme sur lui-même. Il condamne tout ce qui constitue une atteinte à l’intégrité humaine. Il analyse les faiblesses de la nature humaine et ses imperfections. Il mène une réflexion sur la formation possible de l’homme : la pédagogie - dans le chapitre I, par exemple, il s’interroge sur une nouvelle conception de l’instruction pour les enfants -, les voyages : il propose une réflexion sur ce qu’apportent les voyages, sur la confrontation des civilisations, sur la notion de barbarie.

Par la suite, le genre se développe et l’auteur prend de plus en plus position et défend des théories. Les Pensées (1670) de Pascal (1623-1662) qui défend la foi chrétienne en dénonçant ce qui nuit à la raison ; l’imagination, en proposant une image de la condition humaine et de l’homme sans Dieu, perdu entre deux infinis. Emile ou de l’Education (1762) de Rousseau (1712-1778) propose une réflexion et un modèle d’éducation à travers cinq livres correspondant aux cinq étapes de l’évolution d’Emile. Ecrits sur l’Art (1855) de Charles Baudelaire (1821-1867), essai dans lequel Baudelaire s’impose en critique d’art et en observateur des évolutions de son époque. Il expose aussi une conception personnelle des différents peintres et différents tableaux qu’il évoque. Dans le Deuxième sexe (1949), Simone de Beauvoir (1908-1986) expose sa thèse féministe. Elle y dénonce la condition des femmes, leur éducation : « On ne naît pas femme, on le devient », mais aussi la supériorité de l’homme dans la société. Elle veut définir un portrait de la femme libérée et indépendante.

L’auteur s’efforce, à travers l’essai, de convaincre ses destinataires du bien-fondé de ses positions. Montaigne, dès le début des Essais, s’adresse directement à son lecteur, en le nommant et en le tutoyant pour exposer ses raisons d’écrire :

« C’est ici un livre de bonne foi, lecteur. Il t’avertit dès l’entrée que je ne m’y suis proposé aucune fin que domestique et privée ».

Il propose aussi une délibération sur un sujet qu’il veut éclairer différemment. Dans la partie des Essais intitulée « Des cannibales », Montaigne veut faire réfléchir sur la notion de civilisation :

« Chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage ».

Il invite ainsi son lecteur à considérer différents points du vue.

Un essai peut refléter la subjectivité de son auteur qui apparaît à travers un lexique plus ou moins mélioratif. Certains auteurs considèrent l’essai comme le moyen de mettre à l’épreuve leurs pensées et de vérifier leur pertinence. Le genre apparaît alors comme une démarche de recherche intellectuelle.

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