Depuis l'ère de la reproductibilité de l'œuvre (voir l'ouvrage de Walter Benjamin : L’Œuvre d’art à l’ère de sa reproductibilité technique de 1936), la valeur artistique de la réalité concrète d’une création plastique peut être questionnée. La présence physique de l’œuvre est démultipliée, mais jamais remplacée, par ses nombreuses reproductions, d'abord mécaniques (gravure), puis chimiques (photographie) et désormais immatérielles avec le numérique. Sa possible dématérialisation est devenue pour certains artistes un enjeu plastique, avec des œuvres pensées, réalisées et exposées dans leur immatérialité. Miguel Chevalier en est un exemple.
Lorsque l'œuvre est immatérielle, que devient l'expérience de celle-ci par des perceptions visuelles, sonores, olfactives mais jamais haptiques ? Ceci étant, les œuvres, matérielles, exposées sous verre, vitrine ou à distance, ne permettent pas non plus l'expérience tactile de leur matérialité.
L'ère de la reproductibilité questionne nécessairement l’authenticité de l’œuvre : quelles valeurs artistiques, sociales, symboliques de la matérialité, du savoir-faire de l’artiste, de la dématérialisation, de l'immatérialité et de leurs évolutions accordons-nous ?
La perte de matérialité conduit parfois aussi au renouvellement de l’œuvre sous forme non plus d'objet mais de pratiques sociales, d'évènements, de gestes, de rites ou de happenings. L'esthétique relationnelle définit par Nicolas Bourriaud donne alors de nouvelles entrées de compréhension et d'analyse des œuvres.